La Commission veut apporter son expertise pour les régions en déclin démographique

Les États membres ont jusqu'au 31 octobre pour soumettre la liste des projets pour lesquels ils sollicitent une expertise de l'instrument d'appui technique de la Commission européenne. Cette année, Bruxelles met l'accent sur les question de pénuries de main-d'oeuvre et d'adaptation des compétences. En particulier dans les régions en déclin démographique. En France, 14 projets sont actuellement soutenus par l'IAT.

Plein phare sur les pénuries de main d'oeuvre. Dans le cadre de l'année européenne des compétences, la Commission a décidé mettre son instrument d'appui technique (IAT) à contribution pour "favoriser des systèmes de développement des compétences mieux adaptés au marché du travail". Elle identifie plusieurs défis pour l'Union européenne : l'inadéquation persistante des compétences, les pénuries de main-d'œuvre et le manque de compétences pour les transitions verte et numérique et une main-d'œuvre vieillissante et en diminution, en particulier dans certaines régions européennes. Dans un communication de janvier 2023, la Commission avait déjà lancé un mécanisme de "valorisation des talents" dans les 82 régions européennes représentant 30% de la population européenne, tout particulièrement touchées par ce déclin démographique. Parmi ces territoires au "piège de développement des talents" : la Haute-Normandie, la Champagne-Ardenne et la Lorraine.

L'IAT permettra d'apporter un éventail de solutions : consultations, analyse et cartographie des besoins en formation, accompagnement dans la mise en œuvre de stratégies, de feuilles de route, de plans d’action et de mécanismes de suivi et d’évaluation, tests pilotes...

Chaque pays a jusqu'au 31 octobre pour communiquer la liste des projets qu'ils souhaite ainsi voir soutenus. En France, c'est le secrétariat général aux affaires européennes (Sgae) qui sert de porte d'entrée.

Créé tout d'abord sous la forme d'une "task force" pour appuyer les réformes conduites en Grèce à la suite de la crise de 2008, l'IAT a ensuite été étendu à d'autres pays comme le Portugal ou Chypre, avant de l'être à l'ensemble des Etats membres. Son rôle : aider les États à entreprendre des réformes concourant à la "croissance inclusive", que ce soit dans le domaine des transitions verte et numérique, des finances publiques, de l'administration publique, de l'éducation et formation, du soutien aux entreprises, du marché du travail, des services sociaux, des migrations, de la santé, de l'union bancaire, des marchés de capitaux ou encore de la mise en œuvre des sanctions contre la Russie...

115 millions d'euros par an

Depuis 2017, l'IAT (ou STI en anglais) a permis de soutenir 1.500 projets à travers l'UE, dont 42 pour la France et 14 pour la seule année 2023, a indiqué la DG Reform, lors d'une conférence de presse organisée par la représentation en France de la Commission européenne, mercredi 27 septembre. La "France est très bien placée", assure une responsable de la DG Reform.

Si l'Union européenne est souvent accusée de manier la carotte et le bâton pour contraindre les États de mener des réformes structurelles (via notamment le Semestre européen ou la Facilité pour la relance et la résilience), rien de tel ici. Ce sont les États qui la sollicitent. Et l'accompagnement peut se faire au profit des autorités régionales et locales. Le soutien n'est pas financier, il s'agit de fournir une expertise technique sur mesure. Ce qui le distingue des autres moyens d'interventions de l'UE, comme les subventions de la politique régionale par exemple.

L'IAT dispose d'une enveloppe pluriannuelle de 864 millions d'euros de 2021 à 2027, soit environ 115 millions d'euros. Un marché juteux pour les cabinets de consultants auxquels la Commission a souvent recours pour effectuer ces missions, comme l'avait révélé le site Euractiv en 2021. "Nous servons l'intérêt public, nous mobilisons notre budget mais sommes au fait des politiques européennes en la matière", se défend-on à la Commission, alors qu'en France le recours massif aux cabinets privés par l'État a récemment été l'objet de vives polémiques.  

L'attractivité de la fonction publique dans quatre régions françaises

Mais l'intervention de l'IAT est très éclectique. Parmi les 14 projets soutenus cette année en France figure un programme visant à renforcer l'attractivité de la fonction publique dans quatre régions : Grand Est, Hauts-de-France, Île-de-France et Normandie. L'objectif est de jauger l'attractivité de ces métiers en entrée en formation et trois ans plus tard, "pour que les jeunes fonctionnaires restent". La municipalité écologiste de Strasbourg a reçu de son côté une expertise pour intégrer la question de genre à tous les niveaux dans l'élaboration de son budget. Dès 2026, elle présentera son premier budget entièrement dévolu à l'égalité de genre. D'autres villes comme Paris et Lyon se montreraient intéressées.

Le gouvernement français a aussi bénéficié d'une expertise de l'IAT pour l'élaboration de son plan "Logement d'abord".

Certains programmes sont "multipays", comme le programme "Pace" (échange de coopération entre administrations publiques) lancé à l'initiative de l'ancienne ministre Amélie de Montchalin pendant la présidence française. Cet "Erasmus des fonctionnaires" permet à 300 agents de 18 administrations nationales d'échanger sur leurs pratiques. L'IAT a aussi été mise à profit pour aider 17 pays (la France n'en fait pas partie) à réduire leur dépendance aux combustibles russes et à diversifier leurs approvisionnements.

 

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