Gil Avérous, nouveau président de Villes de France, mobilisé sur les questions budgétaires
Gil Avérous, maire de Châteauroux, succède à Caroline Cayeux à la présidence de Villes de France, association dont il compte renforcer les liens avec le Parlement via un "collège des parlementaires". À l'heure de l'explosion des charges pour les collectivités et de l'approche du projet de loi de finances, il insiste, tout comme Jean-François Debat, resté vice-président de l'association, sur la nécessité d'indexer la DGF sur l'inflation et d'abandonner la suppression de la CVAE.
Suite à la nomination de Caroline Cayeux au gouvernement, Villes de France se devait d'élire un nouveau président. C'est chose faite. Le conseil d'administration de l'association représentant les villes dites moyennes, de 10.000 à 100.000 habitants, a élu ce 14 septembre Gil Avérous, maire LR de Châteauroux et président de l'agglo depuis 2014. Le maire PS de Bourg-en-Bresse, Jean-François Debat, reste vice-président. Gil Avérous ne considère pas sa mission comme un "intérim de neuf mois" jusqu'au renouvellement des instances qui sera organisé lors du prochain congrès de Villes de France – congrès qui, a-t-il été décidé ce mercredi, se tiendra les 6 et 7 juillet au Creusot – mais bien comme une présidence "dans la durée". Et dans la continuité de celle de Caroline Cayeux, à qui il sera d'ailleurs proposé de devenir présidente d'honneur.
Le maire de Châteauroux loue ainsi le "pluralisme" de Villes de France, le fait de "défendre les spécificités des collectivités que nous représentons", d'"être dans l'opérationnel" et dans une attitude "constructive mais exigeante face au gouvernement"… La mise en place et l'essor du programme Action cœur de ville (ACV), "coconstruit" avec l'État, en est selon lui une belle illustration.
Quelles nouvelles impulsions compte-t-il donner à l'association ? S'exprimant à l'issue de son élection, il a tout d'abord mis en avant sa volonté de "renforcer notre lien avec le Parlement". Depuis le non-cumul des mandats, "nous avons plus de mal à rencontrer les parlementaires", constate-t-il. Or à l'heure où le Parlement devrait avoir un poids accru du fait de l'absence de majorité absolue pour l'exécutif, il faut "une porte d'entrée" pour porter les messages de Villes de France. D'où son idée de créer un "collège des parlementaires" s'appuyant notamment sur les anciens maires de villes moyennes élus députés aux dernières législatives (les élus d'Ajaccio, Vierzon, Fontainebleau, Saint-Dié…), qui serait régulièrement invité à échanger avec les membres actuels.
Son deuxième "axe" : "renforcer les liens directs avec les adhérents" en "relançant des actions sur les territoires", en allant "à la rencontre" des élus, en faisant "des focus sur des opérations de terrain"… un peu sur le modèle de l'opération "Une journée avec Villes de France" organisée l'an dernier à Laon dans l'Aisne.
"Les charges explosent"
Mais dans l'immédiat, la priorité de Villes de France semble bien être de participer à la mobilisation des associations d'élus locaux sur "le contexte particulièrement tendu" que connaissent aujourd'hui les collectivités sur fond d'inflation. Un enjeu évidemment d'autant plus urgent que l'heure du projet de loi de finances pour 2023 approche à grands pas. Or beaucoup de choses vont se jouer dans ce cadre-là.
Le tableau est connu mais les villes moyennes se disent particulièrement touchées, du fait notamment de leurs charges de centralité : "Les charges explosent." Les factures énergétiques bien sûr. Jean-François Debat évoque une multiplication par quatre et jusqu'à par dix selon les villes. "Oui, nous allons nous engager sur une réduction de 10% de notre consommation, c'est un enjeu de sobriété pour 'passer l'hiver', mais cela ne changera pas la donne en termes financiers", résume-t-il.
Gil Avérous évoque pour sa part aussi les charges de personnel, avec la hausse de 3,5% du point d'indice, à laquelle s'ajoute les revalorisations sectorielles (catégorie B, Ségur…), entraînant au total une hausse des charges salariales d'environ 7%. Et ce, rappelle-t-il, alors que les villes "essayaient de maintenir l'évolution de la masse salariale en-deçà du GVT" (glissement vieillissement technicité) et que "les efforts possibles ont déjà été faits sous le quinquennat de François Hollande". Dans ce contexte, "même avec la meilleure volonté du monde, beaucoup d'entre nous ne voient pas comment boucler leur budget", témoigne-t-il. Et songent à réduire certains services publics, par exemple dans le champ de la culture.
D'où, selon les deux élus, la nécessité absolue d'obtenir "une DGF indexée sur l'inflation". Le gouvernement a jusqu'ici exclu cette hypothèse. Certes, les bases de taxe foncière vont être "revalorisées de 7%". Mais les volumes en jeu ne sont pas comparables avec la dotation globale de fonctionnement. En outre, "les maires seront montrés du doigt", prévoit Gil Avérous. Quant à une hausse des taux, elle serait là encore délicate et d'un impact budgétaire relativement peu significatif.
CVAE : "une décision incompréhensible"
Indexer la DGF… et abandonner l'idée de supprimer la CVAE. Comme toutes les autres associations de maires, cette suppression - correspondant à 10 milliards de recettes - toujours envisagée par le gouvernement dans le cadre du PLF est une "aberration". "C'est une décision incompréhensible", tranche Jean-François Debat, "cela va compromettre la lisibilité et l'évolutivité de nos recettes". Étant donné que le contexte "a beaucoup changé" depuis la promesse du président-candidat Macron, "il n'y aurait pas de déshonneur à la reporter sin die". Le fait que Bruno Le Maire vienne d'annoncer que cette suppression se ferait finalement sur deux ans et non en une seule fois (voir notre article du 12 septembre) montre qu'il "commence à se rendre compte". Mais sur le fond, que ce soit un ou deux ans ne change pas les choses et "ne fera que des mécontents". C'est par exemple ce qu'a également jugé France urbaine le 13 septembre dans un communiqué. "Nous comptons sur les parlementaires pour un retour à la raison", espère le maire de Bourg-en-Bresse.
Le gouvernement serait peut-être en train d'infléchir sa position sur un point : le projet de révision des valeurs locatives, "qui pose beaucoup de problèmes à nombre de nos villes". "Sur ce sujet, il y a une prise de conscience de Gabriel Attal. Cette réforme sera vraisemblablement suspendue", prévoit Gil Avérous.
Gabriel Attal, Christophe Béchu, Caroline Cayeux… les deux élus reconnaissent malgré tout que le dialogue avec le gouvernement actuel est plus aisé que lors du précédent quinquennat : "Les ministres sont plus disponibles", "depuis l'arrivée d'Elisabeth Borne, la consigne a visiblement été donnée de nous consulter, de prendre le pouls des élus locaux au fur et à mesure, c'est un point positif".