Gouvernement - Des périmètres ministériels remaniés

Pas facile de retrouver ses repères habituels dans la composition du nouveau gouvernement. Réorganisations administratives et changements d'interlocuteurs sont à prévoir.

Appellations chamboulées, administrations regroupées, portefeuilles redécoupés... la configuration du gouvernement Fillon risque de bousculer les habitudes, notamment pour les acteurs publics et interlocuteurs des services de l'Etat. "La réorganisation administrative est plus éclairante que le choix des hommes pour comprendre ce gouvernement", va d'ailleurs jusqu'à affirmer le politologue Dominique Reynié.
Avec quinze ministres, le gouvernement nommé vendredi compte le même nombre de ministères de plein exercice que l'équipe Villepin. Si l'on n'y trouve aucun ministre délégué, contre quinze auparavant, quatre secrétaires d'Etat - et un "haut commissaire" - ont été nommés. Et d'autres secrétaires d'Etat, dont on ne sait rien ou presque pour le moment, sont attendus après les législatives.
Ainsi, du côté du ministère désormais occupé par Michèle Alliot-Marie en tant que ministre de l'Intérieur, de l'Outre-Mer et des Collectivités territoriales, on ne trouve pour l'heure ni ministre délégué ni secrétaire d'Etat spécifiquement en charge des collectivités. Même chose d'ailleurs pour l'Outre-Mer, qui a perdu son ministre dédié. Et si Michèle Alliot-Marie a assuré qu'elle sera "bien sûr" secondée par un secrétaire d'Etat à l'Outre-mer (le nom le plus souvent cité est celui de Christian Estrosi), rien n'indique qu'il en sera de même pour les collectivités locales. Autre changement : la Place Beauveau se défait de l'aménagement du territoire, qui passe sous la houlette du super-ministère confié à Alain Juppé.

 

Comptes publics

Ce nouveau ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement durables - un ministère aux compétences "considérables", qui aura "une mission d'évaluation transversale des politiques publiques au regard du développement durable", selon les termes d'Alain Juppé - s'articulera autour de "quatre pôles opérationnels" : transports et déplacements ; habitat, aménagement urbain et aménagement du territoire ; politiques énergétiques ; un pôle écologique concernant les ressources et les équilibres naturels. Seul le secrétaire d'Etat aux Transports, Dominique Bussereau, a été nommé mais d'autres devraient suivre.
Sur le front de l'habitat, il faudra aussi compter avec un autre ministre, en l'occurrence Christine Boutin, nommée ministre du Logement et de la Ville, qui s'est installée rue de Grenelle. Christine Boutin a d'ores et déjà déclaré que la mise en oeuvre de la loi relative au droit au logement opposable - texte dont elle a récemment été rapporteur au nom de la commission des affaires culturelles et sociales de l'Assemblée - constituera sa "priorité".
Au rang des nouveautés, bien sûr, l'"éclatement" de Bercy figure en bonne place : à Jean-Louis Borloo un ministère semblable au Miti japonais, rattachant l'Emploi à l'Economie et intégrant le Commerce extérieur ; à Eric Woerth un Budget devenu autonome, et pilotant l'ensemble des "comptes publics", notamment sociaux.
Le premier entend ainsi affirmer "une vision dynamique de l'emploi qui dépend de la bonne santé des entreprises", selon les termes du député Gilles Carrez. Mais alors que certains partenaires sociaux s'étaient inquiétés de l'éventuelle disparition d'un ministère du Travail de plein exercice, Xavier Bertrand se voit finalement chargé de ce portefeuille, associé aux Relations sociales et à la Solidarité.

 

Le secteur sanitaire et social cherche son interlocuteur

Eric Woerth, en tant que ministre du Budget, des Comptes publics et de la Fonction publique, aura pour sa part une approche d'ensemble de la cure programmée d'amaigrissement de l'Etat. "Je suis aussi le ministre des économies", a-t-il d'ailleurs lancé lors de son arrivée à Bercy. Plusieurs syndicats de fonctionnaires se sont précisément déclarés inquiets de cette nouvelle configuration, craignant que la vision "comptable" ne l'emporte au détriment des besoins. Des syndicats que le nouveau ministre recevra cette semaine pour une première prise de contact.
Pour les acteurs du secteur sanitaire et social, la nouvelle cartographie ministérielle risque de paraître quelque peu déroutante avec la dissolution, non seulement du grand pôle "cohésion sociale" qui s'était constitué autour de Jean-Louis Borloo, mais aussi du pôle "santé et solidarités" que se partageaient Xavier Bertrand et Philippe Bas. Car si Roselyne Bachelot récupère la Santé - désormais associée à la Jeunesse et aux Sports -, certains publics des politiques sociales ne se trouvent plus explicitement pris en compte.
Ainsi, trois associations représentant les personnes âgées et les maisons de retraites (l'AD-Pa, la Fnapaef et le Synerpa) regrettent l'absence d'un ministère chargé des personnes âgées alors même que "le nombre des plus de 85 ans va doubler dans les dix ans". Même réaction de la part de deux fédérations d'associations représentant les handicapés (Fegapei et Apajh), qui demandent dès maintenant la création d'un ministère délégué ou secrétariat d'Etat consacré au handicap, "dans la continuité de l'importante loi du 11 février 2005".
Sur le versant social, on n'oubliera pas, enfin, la nomination de Martin Hirsch comme haut commissaire aux solidarités actives contre la pauvreté. Un poste qui doit en principe lui permettre de mettre en oeuvre le revenu de solidarité active que plusieurs départements se sont déjà engagés à expérimenter... et donc aussi, de fait, d'engager une réforme des minima sociaux. Un projet de loi en ce sens, a-t-il annoncé, sera présenté "dès cette année".


 

Claire Mallet, avec AFP

 

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