Des conseillers au commerce extérieur reconduits ou nommés au moment où plonge le déficit commercial

De nombreux conseillers au commerce extérieur sont reconduits ou remplacés dans chaque région, par un décret du 2 février. Ces conseillers bénévoles nommés pour trois ans doivent faciliter les projets de développement des entreprises à l'international. Et ce au moment où le déficit de la balance commerciale atteint un nouveau record, à 164 milliards d'euros en 2022.

Face à un déficit commercial abyssal, le gouvernement maintient sa confiance dans son armée de "conseillers du commerce extérieur" en poste en France ou à l'étranger. Un décret du 2 février 2023, publié au Journal officiel du 4 février, les reconduits dans leurs fonctions, avec aussi des nominations nouvelles, région par région, pour un mandat de trois ans commençant le 1er janvier 2023.

Ces conseillers, dont la création remonte à la fin du XIXe siècle, sont des chefs d'entreprises et experts de l'international qui mettent bénévolement leur savoir-faire et expérience au service de la présence française dans le monde. Ils constituent un réseau de 4.200 hommes et femmes : 1.500 en France, dans toutes les régions et plus de 2.500 dans le monde, dans plus de 150 pays. Intégrés à l'équipe de France de l'export ("Team France Export") créée en 2018, ils ont quatre missions principales : l'appui aux entreprises, la promotion de l'attractivité de la France, la formation des jeunes à l'international et le conseil aux pouvoirs publics.

Ils constituent aujourd'hui une armature de la Team France Export, au sein de laquelle ils travaillent plus spécifiquement à l'aide à la préparation et au financement des projets de développement des entreprises à l'international. Des enjeux majeurs à l'heure où le déficit commercial de la France plonge. D'après les résultats du commerce extérieur de la France en 2022, présentés le 7 février 2023 par Olivier Becht, ministre délégué chargé du commerce extérieur, de l'attractivité et des Français de l'étranger, il atteint 164 milliards d'euros en 2022. Un doublement en un an. Une chute qui s'opère dans un contexte mondial dégradé (invasion russe de l'Ukraine, tensions sur les chaînes d'approvisionnement, flambée des cours des matières premières, hausse de l'inflation et remontée des taux d'intérêt). 

Une meilleure coordination des membres de la Team France Export

 "En 2022, les excédents constatés en matière de services (+50 milliards d'euros) et de revenus (+31 milliards d'euros) ne suffisent plus à compenser le déficit commercial enregistré sur les biens. Il atteint 164 milliards d'euros, soit une dégradation de 78 milliards d'euros sur un an, imputable quasi exclusivement (à 86%) à la facture énergétique", indiquent les résultats. Les importations de gaz ont ainsi augmenté de 248% à 59 milliards d'euros, celles de pétrole brut de 99% et celles de produits pétroliers de 60%. 

Le ministre a toutefois mis en avant quelques points positifs, parmi lesquels un tissu exportateur de plus de 144.000 entreprises exportatrices au troisième trimestre 2022 (elles étaient 130.000 deux ans avant) et une forte attractivité de la France (première place en Europe avec 1.222 projets d'investissements étrangers).

Le contexte international n'explique pas tout. L'Allemagne a quand même enregistré un excédent de 76 milliards d'euros, certes en forte baisse. Et l'Italie affiche un déficit bien moindre à 31 milliards d'euros. Si la chute de 2022 est brutale, le déficit chronique de la balance commerciale de la France résulte "d'un long processus induit par le choix politique de la désindustrialisation de la France depuis 40 ans, et s'est simplement aggravée avec les récentes crises sanitaire et énergétique", comme le dénonce la délégation aux entreprises du Sénat, dans un rapport intitulé "Commerce extérieur : l'urgence d'une stratégie publique pour nos entreprises" publié le 30 janvier 2023. Les sénateurs saluent la mise en place de la Team France Export qui a permis d'accompagner 10.547 PME et ETI en 2021 mais déplorent "un manque cruel de vision stratégique pour la France et ses entreprises". Ils formulent dix propositions pour remédier à cette situation, appelant à une meilleure coordination entre les membres de la Team France Export, et la présentation des résultats de son action devant le conseil stratégique de l'export. 

Les sénateurs proposent aussi de définir, via une loi d'orientation économique pour la France, une stratégie à long terme (2040 a minima) pour arrêter les objectifs en matière de commerce extérieur et de souveraineté économique et identifier les secteurs, compétences et entreprises à soutenir. Ils comptent rénover le conseil stratégique de l'export, en intégrant les objectifs du commerce extérieur dans les différentes politiques publiques ayant un impact sur la balance commerciale.

D'autres mesures, plus opérationnelles, sont envisagées comme inciter les entreprises à "chasser en meute", faciliter la transmission d'entreprise et soutenir les PME et ETI pour encourager les relocalisations et réindustrialiser la France, et définir le contenu, le cadre et les règles éthiques de constitution et de fonctionnement d'une base de données françaises permettant d'accompagner finement les PME françaises à l'export.

C'est dans ce contexte déprimé qu'Olivier Becht accueillera le Bercy France Export jeudi, avec comme fil rouge la "réindustrialisation verte".

Référence : décret du 2 février 2023 portant nomination et radiation de conseillers du commerce extérieur de la France, publié au Journal officiel du 4 février 2023.