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Formation professionnelle - Décentraliser la formation : ce qui reste en chantier

Enchevêtrement des compétences, manque de ressources, décrets en attente : la régionalisation de la formation professionnelle est en quête d'un second souffle.

Entamée depuis plus de vingt ans, la décentralisation de la formation professionnelle a franchi un nouveau cap avec la loi du 13 août 2004. Lors d'un séminaire organisé les 10 et 11 mai à Angers, le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) s'est interrogé sur ses enjeux et perspectives. Au fil des années et des évolutions législatives, les régions ont pris à coeur leur nouvelle mission. En 2004, les conseils régionaux ont ainsi assuré le financement de la formation pour 47% des demandeurs d'emploi, jusqu'à 56% pour la région Centre, et ont contribué à hauteur de 2,7 milliards d'euros au financement de la formation et de l'apprentissage. Neuf régions, parmi lesquelles la Basse-Normandie, le Limousin, Midi-Pyrénées et Poitou-Charentes, consacrent même une part dans la formation des demandeurs d'emploi supérieure à la moyenne nationale. A l'inverse, les dépenses de l'Etat dans ce domaine ont progressivement diminué, avec une baisse de 6,8% en 2004, voire 10,9% si l'on exclut la formation des agents de l'Etat, qui représente 42% de l'ensemble des dépenses. Et tous les acteurs confirment le rôle incontournable des régions en matière de formation. "La région travaille sur le terrain, à une échelle humaine, elle est bien placée pour organiser la coordination de l'ensemble des acteurs de la formation", explique ainsi Edith Arnoult Brill, membre du Conseil économique et social. "Le conseil régional est indispensable pour assurer la cohérence de l'ensemble, c'est lui qui défend le mieux l'intérêt général", assure aussi Jean-René Chrétien, président de l'Organisme paritaire collecteur agréé régional du Pays-de-la-Loire. Pour autant, la décentralisation de la formation n'est pas totalement achevée et elle pose encore de nombreuses interrogations. "Il y a encore beaucoup d'incertitudes qui viennent d'un enchevêtrement des compétences", explique Elie Gueguen, directeur général adjoint de la région Bretagne. Principal problème : l'Etat, qui a transféré progressivement les compétences aux régions, gère toujours le financement de la formation et les régions se plaignent de ne pas disposer de suffisamment de moyens. Certaines estiment le manque à gagner à des milliers, voire des millions d'euros.

 

"La décentralisation ne s'est faite qu'à moitié"

"La décentralisation ne s'est faite qu'à moitié, critique le vice-président du conseil régional Pays-de-la-Loire, Patrick Cotrel. Il faudrait que la région, à travers son plan régional de développement des formations (PRDF) notamment, ait force de loi. Or ce plan n'est pour le moment qu'indicatif." Depuis 1993 en effet, les régions doivent élaborer un PRDF pour assurer la coordination de l'ensemble des actions des institutions en charge de la formation mais elles avancent à des rythmes différents. "Certaines, comme la Haute-Normandie, mettent déjà en oeuvre leur plan annuellement, d'autres en sont à leur premier plan, comme l'Alsace", détaille Régis Roussel, chargé de mission Europe-régions au Centre Inffo, l'organisme d'information du secteur. Autre problème posé par la décentralisation : le positionnement de l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa). Depuis la loi de 2002, la région s'est vu confier le soin d'arrêter son schéma régional mais ce nouveau statut décentralisé de l'Afpa pose une interrogation : le conseil régional doit-il mettre en place un service public de la formation intégrant l'organisme public, ou laisser le marché fonctionner librement et mettre l'association en concurrence avec les autres organismes de formation ? Enfin, de l'avis de tous, le transfert de compétences de l'Etat vers les régions n'est pas totalement achevé. Les régions demandent notamment la décentralisation de l'appareil d'accueil, d'orientation et d'information qui reste toujours entre les mains de l'Etat. En matière d'apprentissage, elles souhaitent disposer de la totalité des financements qui, pour le moment, sont encore gérés par l'Etat, via le Fonds national de développement et de modernisation de l'apprentissage (FNDMA). Le projet de décret concernant ce fonds a d'ailleurs récemment provoqué une polémique. Il prévoit que le FNDMA soit également consacré aux actions nationales de communication et aux centres de formation d'apprentis, alors que les régions souhaitent que ces fonds servent essentiellement à l'apprentissage régional.

 

Emilie Zapalski

 

Les étapes-clés de la décentralisation de la formation professionnelle et de l'apprentissage

- le transfert de l'apprentissage et de la formation professionnelle continue : loi du 7 janvier 1983
- le transfert de la formation continue des jeunes : loi du 20 décembre 1993
- le transfert du versement de l'indemnité compensatrice forfaitaire aux employeurs d'apprentis : loi du 27 février 2002
- la décentralisation de la subvention allouée à l'Association nationale pour la formation professionnelle des adultes (Afpa) au titre des actions de formation : loi du 13 août 2004.

 

 

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