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Décentralisation des Creps : les régions ne se sont pas emparées de toutes leurs nouvelles missions

Un rapport de l'inspection générale de l'Éducation, du Sport et de la Recherche dresse un bilan de la décentralisation partielle des centres de ressources, d'expertise et de performance sportive (Creps), intervenue en 2016. Si les régions ont massivement investi dans les infrastructures, leur politique de formation est jugée mitigée.

Si l'on devait s'en tenir à la liste des préconisations émises à l'issue du bilan de la décentralisation partielle des Creps (centres de ressources, d'expertise et de performance sportive) tel qu'il figure dans un rapport récemment publié par l'inspection générale de l'Éducation, du Sport et de la Recherche (IGESR) – mais remis en septembre 2021 à la ministre des Sports –, on pourrait en conclure que cette décentralisation partielle n'a été qu'une réussite… partielle. Les 28 préconisations laissent en effet penser que de nombreuses lacunes restent à combler dans la gestion de ces établissements.

La décentralisation partielle des Creps est intervenue au 1er janvier 2016, en application de la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notre). Sur le modèle des lycées, l'État a confié aux conseils régionaux le patrimoine immobilier des dix-sept Creps existants partout sur le territoire national – à l'exception des régions de Bretagne et de Normandie, où des activités comparables se déroulent sous l’égide de groupements d’intérêt public, et de Corse – ainsi que les fonctions supports liées à ce patrimoine (accueil, hébergement, restauration, entretien). Il leur a aussi permis de conduire en leur sein des politiques d’intérêt régional en faveur du sport, de la jeunesse et de l’éducation populaire. Parallèlement, l'État devait continuer d'assurer ses missions nationales en matière de sport de haut niveau et de service public de formation.

Investissement massif des régions

La mission estime tout d'abord que le transfert du patrimoine immobilier des Creps et des fonctions supports "a atteint les objectifs fixés par le législateur". Elle souligne que les régions ont engagé depuis 2016 "un vaste programme de modernisation, d’extension, voire de reconstruction des Creps, accéléré par la perspective de voir ceux-ci retenus comme centres de préparation aux Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024". Un effort chiffré à 316 millions d'euros en autorisations de programme selon un recensement communiqué par Régions de France. "Le ministère chargé des sports n’aurait pas été en mesure de financer des investissements dans les Creps à une telle hauteur", reconnaît la mission.

Toujours à propos des équipements, le rapport note que "les Creps sont bien implantés au plan local" et ajoute : "Le plus souvent, des conventions sont conclues avec les communautés d’agglomération ou les métropoles où ils sont implantés pour l’utilisation d’équipements sportifs. Dans certains cas, les projets d’investissement portés par les régions ont été élaborés en cohérence et en complémentarité avec des équipements situés à proximité et relevant des communautés d’agglomération ou des métropoles." Dans le même ordre d'idée, les efforts de mutualisation engagés entre Creps d'une même région sont soulignés.

Le rapport se félicite également de ce que les régions "ont assumé leur responsabilité d’employeur" vis-à-vis des 375 agents transférés : "De nombreux agents au statut précaire ont vu leur situation améliorée par leur intégration à la fonction publique territoriale." On notera ici que la grande majorité des régions ont choisi le cadre d’emploi des adjoints techniques territoriaux des établissements d’enseignement (ATTEE), tandis que les autres optaient pour le cadre d’emploi des adjoints techniques territoriaux (ATT).

Stagiaires "régionaux" en recul

Mais au-delà du transfert de responsabilité relatif au patrimoine immobilier et aux fonctions supports, la mission rappelle que l’enjeu de la décentralisation partielle était également de "permettre aux Creps d’exercer des missions au nom de la région, dans les domaines du sport, des formations, de la jeunesse et de l’éducation populaire". Là, le rapport change de ton, considérant que cet objectif "reste largement à poursuivre".

L’accueil de sportifs de niveau régional relevant de la compétence de la région ? Il s’exerce "en pratique dans le cadre des projets de performance fédéraux validés par l’État". La faculté donnée aux Creps de mettre en œuvre au nom de la région des actions en matière de jeunesse et d’éducation populaire ? Elle reste "à développer". La formation professionnelle et l’apprentissage des métiers de l’animation et du sport ? Leur bilan quantitatif apparaît "mitigé". L’activité de formation des Creps est restée stable entre 2015 et 2019 et la part de financement des régions a diminué. En 2019, 2.105 stagiaires en Creps étaient en effet financés par les conseils régionaux, soit 13,2% des stagiaires, contre 2.465 en 2015 (14,8% du total).

En outre, au chapitre des investissements, la mission constate que la plupart des opérations importantes de construction ou de restructuration n’ont pas fait l’objet d’une étude d'impact économique portant sur les périodes de travaux et post-travaux, alors que ces opérations "ont une incidence sur les capacités d’accueil et d’hébergement ainsi que sur les surfaces à entretenir, donc sur les besoins en personnel ou en crédits de fonctionnement".

Approfondir le partenariat État-régions

Au final, donc, 28 préconisations, tant "techniques" que "stratégiques". On relèvera notamment la volonté de "réaliser, avant toute décision de lancement d’une opération lourde de construction ou de restructuration, une étude du modèle économique de l’établissement pendant la réalisation des travaux et après livraison des bâtiments construits ou restructurés", en lien avec les conseils régionaux, le souci d'"associer les régions à une partie des séminaires des directeurs de Creps", ou encore la nécessité de "renforcer le rapprochement des Creps avec les directions de la formation des régions pour mieux faire connaître leur offre de formation, en adéquation avec les priorités régionales de formation et d’accès à l’emploi".

Plus largement, la mission invite le ministère des Sports, les préfets de région et les directeurs d’établissement à engager avec les exécutifs régionaux "une réflexion sur l’approfondissement du partenariat entre l’État, les régions et les Creps pour la mise en œuvre de politiques territoriales en matière de sport, de formation, de jeunesse et d’éducation populaire, qu’il s’agisse de la déclinaison de politiques nationales ou d’initiatives régionales". Un approfondissement qui devrait se traduire par un renouvellement et un enrichissement des conventions tripartites relatives aux Creps. Selon nos informations, un décret devrait être pris d'ici la fin de l'année pour systématiser à l'échelle de la région la participation de l'Agence nationale du sport – qui n'existait pas en 2016 – aux conventions tripartites.