Développement des territoires - De nouveaux outils pour les maisons des services publics
La loi relative au développement des territoires ruraux du 23 février 2005 entendait donner un coup d'accélérateur en matière d'accès aux services publics en milieu rural en assouplissant les règles relatives aux maisons des services publics (MSP). L'article 107 de cette loi fleuve est en effet venu abroger une partie des contraintes qui pesaient jusque-là sur la mise en place de ces guichets uniques. Le décret d'application correspondant, initialement annoncé pour septembre 2005, vient seulement de paraître. Publié au Journal officiel du 28 mars, il modifie un décret de juin 2001 portant sur les conditions de création d'une maison de services publics soit par convention, soit sous forme de groupement d'intérêt public.
Cet assouplissement de la réglementation concerne en premier lieu le rôle de l'Etat déconcentré : désormais, la création d'une MSP n'est plus soumise à l'autorisation préalable du préfet. Lorsqu'un service de l'Etat (ou un établissement public lié à l'Etat) participe directement à la MSP, le préfet est signataire de la convention au même titre que les autres partenaires. Dans le cas contraire, le projet de convention sera simplement communiqué au préfet pour information. L'Etat n'est plus considéré comme un arbitre incontournable des projets de plates-formes innovantes de services publics, mais comme un acteur et "prestataire" de services comme les autres.
Ouverture au privé
La loi "territoires ruraux" est par ailleurs venue autoriser les acteurs privés à participer à la mise en place des MSP. Le décret est clair sur ce point puisque pour toute signature de convention, le terme de "services publics associés" est remplacé par celui de "services publics ou privés associés". Lors de la préparation de la loi, les parlementaires avaient considéré que cette ouverture s'imposait pour "effacer la séparation trop rigide entre service public et service privé", relancer la création des maisons des services publics dont le bilan était jugé "assez maigre" et finalement "développer les services de proximité dans les zones rurales reculées". Cette ouverture au privé est évidemment déjà une réalité, ne serait-ce que dans la mesure où "la parution de ce décret a été anticipée par les acteurs locaux", reconnaît-on à la Diact où l'on cite en exemple les permanences de notaires, de géomètres, d'assureurs ou encore d'infirmières au sein des MSP.
Le décret publié le 28 mars intervient précisément au moment où le ministère de l'Intérieur et de l'Aménagement du territoire s'apprête à lancer une procédure de labellisation des MSP sous l'enseigne "Relais services publics". Le ministre de l'Intérieur, Nicolas Sarkozy, avait annoncé l'idée de ces relais en novembre dernier devant les maires de France réunis en congrès.
"Relais services publics", un label pour harmoniser l'existant
"Ce label accordé à des points de services polyvalents garantira la qualité des services rendus à l'usager à travers l'engagement au niveau national des réseaux partenaires (?). Il sera notamment financé par l?enveloppe de 50 millions d'euros prévue pour soutenir, en investissement et en fonctionnement, les projets innovants", avait alors précisé le ministre.
Depuis, une mission de préfiguration de ce label a travaillé à l'élaboration d'une charte de qualité. Elle est en cours de finalisation. La labellisation, qui sera confiée aux préfets, concernera aussi bien des lieux nouveaux que des MSP existantes. "Le terme de 'maisons de services publics' est le nom générique contenu dans la loi. On compte aujourd'hui environ 400 ou 450 lieux créés de manière dispersée et sous des formes très hétérogènes, le plus souvent sous l'impulsion des élus locaux. Chacun a inventé ses propres règles de fonctionnement?", explique un spécialiste de la Diact.
La charte de qualité portera, d'une part, sur les relations entre la MSP et le public et, d'autre part, sur l'amélioration des relations entre les différentes administrations participant à la MSP. Elle déterminera un certain nombre de règles en matière, par exemple, de qualité et de délai des réponses apportées aux administrés, de formation des personnels ou de modes d'organisation.
Un délai d'alerte de deux ans
"L'idée d'établir ainsi des normes de qualité est acceptée et même souhaitée par les élus", assure-t-on à la Diact où l'on n'exclut pas la perspective, à terme, d'une véritable certification. On insiste aussi sur le caractère déconcentré de la procédure. Le ministère devrait se contenter de proposer des outils d'accompagnement tels que des modules de formation.
Les relais services publics pourront s'inscrire dans le cadre du volet territorial des contrats de projet Etat-région et bénéficier à ce titre de certains financements spécifiques. Ils peuvent par ailleurs parfaitement trouver une place de choix dans les projets de pôles d'excellence ruraux.
Enfin, la mise en œuvre du nouveau label constituera l'un des moyens privilégiés d'atteindre les objectifs fixés par la charte nationale relative à l'organisation des services publics en milieu rural qui sera conclue dans les jours ou les semaines à venir entre les grandes associations d'élus, l'Etat et les opérateurs publics.
Cette charte, véritable déclaration de bonnes intentions, "organise une concertation effective entre élus, opérateurs et population, très en amont de tout projet de réorganisation d'un service public", selon les termes de Christian Estrosi, le ministre délégué à l'Aménagement du territoire. Dans une interview au quotidien La Croix parue ce 30 mars, Christian Estrosi précise que le texte "met en place un délai d'alerte de deux ans". "Avant toute fermeture de classe par exemple, un maire pourra utiliser ces deux années pour accueillir une entreprise avec de nouveaux salariés, donc de nouvelles familles", explique le ministre délégué.
C. Mallet