Coût de l'énergie : l'industrie résiste mais pour combien de temps ?

Malgré la crise énergétique et la situation internationale, l’industrie parvient à se maintenir, selon les dernières données du cabinet Trendeo qui comptabilise un solde positif de 55 usines au premier semestre. Invité de l’Observatoire des impacts territoriaux de la crise (OITC), mardi 20 septembre, le gérant de Trendeo, David Cousquer, ne cache pas "une impression un peu bizarre" dans ce climat d’attentisme.

"L’impression générale, c’est qu’on est un peu suspendu." Invité le 20 septembre par l’Observatoire des impacts territoriaux de la crise (OITC) pour débattre du degré d’exposition des territoires face au renchérissement du coût de l’énergie, le fondateur et gérant du cabinet Trendeo, David Cousquer, a fait part de sa perplexité à la lueur de ses données trimestrielles. "Il y a un ralentissement indéniable (de l'économie), mais il intervient à un tel niveau d’activité qu’il n’est pour le moment pas douloureux en termes d’emploi". Certes, de nombreuses entreprises ont déjà annoncé des arrêts de production en raison du coût de l’énergie (voir notre article de ce jour), mais "cela ne se traduit pas encore en termes de licenciements." Peut-être parce que la crise intervient après une reprise très forte de l’activité après l’épisode du Covid. "Il est difficile de voir comment va arriver la crise de 2023 que tout le monde pressent (…), on ne voit pas encore d'effets massifs", a insisté David Cousquer.

Retournement de l’emploi

Ainsi, s’agissant de l’emploi, le solde reste positif au premier semestre mais avec un "retournement" au deuxième trimestre. En effet, au premier trimestre, les créations d’emploi étaient en hausse de 24% (par rapport à la même période en 2021) et les suppressions en chute de 82%. Au deuxième trimestre les créations baissent de 20%, le solde se dégrade assez fortement. Sensibles à la conjoncture, les activités de ventes à distance, les centres d’appel et la logistique sont à la peine. "C’est probablement un impact direct de la crise actuelle : il y a un ralentissement après un investissement très très fort pendant la période où tout le monde était confiné, où la livraison à domicile explosait", explique David Cousquer.

Inversement, l’industrie, elle, tient la barre, alors qu’elle était jusqu’ici l’une des premières à baisser la voilure en cas de coup de tabac. "Les nombreux signaux alarmants ne se traduisent pas encore." Sur les huit premiers mois de l'année, 26.625 emplois nouveaux sont comptabilisés, soit un solde net positif de 10.074 par rapport à la même en 2021. L’industrie représente un tiers des annonces des créations d’emploi depuis le début de l’année. Au premier semestre, 90 créations d’usines sont recensées contre 35 fermetures, soit un solde positif de 55 usines. "On n’est pas au niveau de ce que le bruit ambiant et les annonces sur les prix de l’énergie laissent présager", commente le gérant, reconnaissant que "c’est une impression un peu bizarre". Les relocalisations se poursuivent mais accusent une légère baisse : 28 projets recensés au premier semestre contre 46 à la même période l’an dernier. Un ralentissement qui peut s’expliquer par un tarissement des aides incitatives du plan de relance. "L’an dernier, 40% des projets de relocalisation étaient assorties de la mention 'France Relance'", alors que "les projets de relocalisations qui restent sont autofinancés". Toutefois, les délocalisations ne reprennent pas et se maintiennent à un niveau très largement inférieur à celui de 2019 (avec 4 projets recensés au premier semestre 2022).

La transition énergétique écologique en bonne voie

Si la réindustrialisation marque légèrement le pas, la transition énergétique et écologique, elle, semble en bonne voie. "Il y a une très forte hausse des efforts environnementaux", constate David Cousquer. C’est le cas de ST Microelectronics qui va investir "plusieurs millions d’euros" sur son site du Rousset (Bouches-du-Rhône) pour un système de refroidissement qui lui permettra d’économiser 3.000 MWh par an, soit l’équivalent de la moitié de la consommation d’énergie de la tour Eiffel.

Pour Olivier Portier, coordinateur de l'OITC, si l’heure est encore à l’incertitude, les marges de manœuvre des pouvoirs publics risquent d’être très limitées pour faire face au choc. "On sort déjà d’un épisode très lourd où on a mobilisé des financements comme jamais, le niveau des finances publiques est particulièrement exsangue. Est-ce qu’on va être en capacité de remobiliser de tels moyens ? Ces questions se posent autant pour l’État que pour les collectivités locales."

 

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