Cession du Doliprane : Bpifrance va prendre une petite part du capital d'Opella

L'entrée de Bpifrance au capital d'Opella fait partie des garanties obtenues par le gouvernement auprès du fonds d'investissement américain CD&R. Une prise de participation modeste (entre 1 et 2%) qui visera surtout à avoir un oeil sur les décisions de l'entreprise. Le détail des engagements obtenus par l'exécutif.

"Nous ne serons pas dans un Potemkine de gouvernance. Nous serons à la table." Le directeur de Bpifrance, Nicolas Dufourcq, a déclaré, lundi 21 octobre, que la banque publique d'investissement allait entrer au capital d'Opella, la filiale de Sanofi qui produit le Doliprane et qui va être cédée pour 16 milliards d'euros au fonds d'investissement américain CD&R. 

Cette transaction a suscité une vive émotion ces derniers jours (voir notre article du 16 octobre), conduisant le ministre de l’Économie, des Finances et de l’Industrie, Antoine Armand, et le ministre délégué à l’industrie, Marc Ferracci, à monter au créneau pour exiger des garanties. Celles-ci ont fait l'objet d'un accord "inédit" (dixit Bercy) entre Sanofi, CD&R et le gouvernement. "Nous avons exigé des garanties extrêmement précises et extrêmement fortes", a ainsi déclaré Antoine Armand, lundi, lors d'une conférence de presse aux côtés de Marc Ferracci et de Nicolas Dufourcq. "Le Doliprane continuera à être produit en France", a-t-il martelé, avant que son collègue ne précise que "250 millions de boîtes" de Doliprane continueront à être produites sur les sites français de Lisieux (Calvados) et Compiègne (Oise).

Parmi ces garanties figure donc l'entrée de Bpifrance au capital d'Opella, à un niveau somme toute modeste, mais avec un rôle de supervision puisque la banque publique d'investissement aura un siège avec droit de vote au conseil d’administration de l’entreprise. Cette entrée au capital devrait se faire à hauteur de "de 1 à 2%", soit "entre 100 et 150 millions d'euros", de manière à "assurer l'ancrage français d'actifs stratégiques", a indiqué Nicolas Dufoucq (Sanofi devrait conserver 48% des parts). "Et quand Bpifrance est présent au conseil d'administration de l'entreprise, nous sommes vocaux, actifs, parfois activistes, si nécessaire, si la gouvernance dérape", a-t-il poursuivi, évoquant des opérations similaires avec le géant de la lunette Essilor Luxottica ou Idemia, un groupe français spécialisé dans les technologies de reconnaissance faciale et de certification de documents. "L'État sera présent dans cette stratégie industrielle et sanitaire pour être pleinement informé et associé aux prises de décisions de l'entreprises", s'est félicité Antoine Armand.

70 millions d'euros d'investissement sur cinq ans

Les deux ministres ont précisé par ailleurs les autres "engagements fermes" qu'ils ont obtenus pour maintenir l’emploi, la production, le siège et un haut niveau d'investissement en France. CD&R devra maintenir "un niveau minimum de valeur ajoutée produit sur ces sites pendant 5 ans, qui pourra être prolongé par la suite", indique Bercy, sans quoi des pénalités "pouvant s’élever jusqu’à 40 millions d’euros" pourront tomber. L'accord prévoit également le maintien du siège et des activités de R&D en France et la protection de l’emploi avec notamment "une pénalité de 100.000 euros par emploi supprimé par licenciement économique contraint". Enfin, un objectif de 70 millions d'euros d'investissements en cumulé sur les cinq prochaines années est prévu. Le maintien des cadences de production en France et de l'approvisionnement auprès de sous-traitants et fournisseurs français seront également inscrits dans le marbre, avec une pénalité pouvant atteindre 100 millions d'euros. Opella sera ainsi lié par un contrat de fourniture à long terme à Seqens qui porte, à Roussillon (Isère), un projet de relocalisation du principe actif du paracétamol à compter de 2026.  

Décret Montebourg

Par ailleurs, Antoine Armand a rappelé avoir "demandé à l'inspection générale des finances de mener une mission rapide pour évaluer exhaustivement l'ensemble des dispositifs publics dont l'entreprise a pu bénéficier". Selon la CGT, Sanofi aurait touché 130 millions euros en crédit d'impôt recherche par an "depuis plus de dix ans".

Enfin, la procédure de contrôle des investissements étrangers en France ("décret Montebourg") "s’appliquera également, sous le pilotage de la direction générale du Trésor, dans le calendrier fixé par le décret", selon Bercy.

La FCE-CFDT, premier syndicat chez Sanofi - qui, avec la CGT, avait appelé à la grève le 17 octobre - dit "ne pas se satisfaire de cette décision" et "reste mobilisée". "Force est de constater que la forte mobilisation des salariés du groupe, des adhérents CFDT et de la Fédération aura permis d’obtenir certaines garanties pour l’avenir", se félicite-t-elle toutefois.

 

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