Câbles sous-marins : l'Etat prêt à racheter ASN à Nokia pour 100 millions d'euros

Le ministre de l'Economie se rend ce mardi à Calais, en présence de la maire Natacha Bouchart, pour officialiser le rachat par l'Etat du spécialiste des câbles sous-marins, Alcatel Submarine Networks (ASN), détenu depuis 2015 par Nokia. Antoine Armand annonce une révision de la doctrine de l'Etat actionnaire pour le début 2025.

De quoi tourner la page de la vente tumultueuse du Doliprane à un fonds d'investissement américain ? L'Etat va acquérir Alcatel Submarine Networks (ASN), l’ancienne filiale d’Alcatel spécialisée dans les câbles sous-marins, détenue depuis 2015 par le Finlandais Nokia. Ce retour dans le giron français était en discussion depuis quelques mois. Le ministre de l’Economie, des Finances et de l’Industrie, Antoine Armand, va se rendre sur le site historique d'ASN à Calais, ce mardi, pour signer le contrat d'acquisition de l'Etat, en présence de la maire de la ville Natacha Bouchart. L'Agence des participations de l'Etat (APE) va ainsi prendre 80% des parts de la société, Nokia en conservant 20%, mais avec la possibilité pour l'Etat de monter à 100% dans les années qui viennent. Le coût de l'opération devrait se chiffrer à 100 millions d'euros alors que l'entreprise est valorisée à 350 millions d'euros, indique Bercy. Le rachat sera indolore pour les comptes publics puisqu'il passera par le compte d'affectation spéciale "participations financières de l'Etat" et non par le budget. Il devrait être effectif fin 2024 début 2025. "Nous avons les moyens de mener cette opération sans avoir besoin de recourir à d'éventuelles cessions", tient à préciser l'APE qui détient un portefeuille de 85 entreprises pour un montant d'environ 180 milliards d'euros, rapportant près de 2,5 milliards d'euros de dividendes à l'Etat ces dernières années.

Actionnaire de long terme

"ASN est pour l'Etat une entreprise stratégique pour la conception, la fabrication, la maintenance et la pose de câbles sous-marins", intérêt qui s'est "renforcé par le contexte de la guerre russo-ukrainienne" (avec le risque d'attaques), souligne-t-on dans l'entourage du ministre, où l'on rappelle qu'ASN est l'un des leaders mondiaux dans son domaine, avec 33% de parts de marché.

L'Etat entend ainsi jouer son rôle d'actionnaire de long terme dans un secteur en croissance. "Ce sont des enjeux de souveraineté pour la France et pour l'Europe", sachant que 99% des communications numériques mondiales transitent par les câbles sous-marins, souligne pour sa part l'APE.

Négociée depuis plus d'un an, la transaction a été validée par les syndicats. "Ces négociations longues se concluent par un alignement presque parfait de l'ensemble des acteurs", se félicite-t-on au cabinet du ministre. Pour Nokia, la décision de céder cette pépite répondrait à sa volonté de "se recentrer sur les réseaux terrestres". 

Une doctrine d'investissement non actualisée depuis 2017

Le chiffre d'affaires d'ASN qui se monte à un milliard d'euros "pourrait doubler, voire tripler dans les années à venir", estime Bercy. L'entreprise compte aujourd'hui 2.000 salariés dont 1.370 en France et 600 à Calais. Elle possède également d'autres sites au Royaume-Uni et en Norvège.

Alors que l'Etat pourrait également arriver à la rescousse d'Atos, aujourd'hui lourdement endetté, le ministre de l'Economie a défendu, dans un entretien aux Echos, un Etat "stratège". "Je ferai évoluer la doctrine [de l'Etat actionnaire] dès le début de l'année prochaine", a-t-il annoncé. Malgré le passage de la crise sanitaire et le retour de la guerre en Europe, cette doctrine n'a pas été officiellement actualisée depuis 2017. Au grand dam de la commission des affaires économiques du Sénat qui l'an dernier dénonçait une mise en oeuvre "opaque".

 

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