Avec Petites villes du futur, Lormes réinvente collectivement la ruralité (58)

À Lormes la démarche participative Petites villes du futur a pris au-delà des espérances. Ce bourg de 1 400 habitants accueille aujourd’hui une multiplicité de tiers lieux, publics et privés, d’espaces associatifs, de lieux multi-activités comme les galeries d’exposition, favorisant rencontres, échanges, et développement tous azimuts.

« En 2015, une quinzaine de communes du pays Nivernais-Morvan acceptent l’idée de travailler collectivement à l’invention d’une petite ville du futur avec les élus, les habitants, des architectes, des designers de services, des acteurs du développement local, ainsi que des artistes pour mettre l’ensemble en mouvement », explique Christian Paul, maire de Lormes depuis 2020. Petite ville du futur est une démarche incubée par la région Bourgogne en 2011, couvée par le pays Nivernais-Morvan, dont Christian Paul est président, et aujourd’hui en pleine éclosion à Lormes.

« 30 000 € sont alors attribués à chacune de ces communes embarquées, invitées à mener une très large concertation auprès de leurs habitants pour inventer un futur collectif, précise l’élu. Ou plutôt des futurs. Chacune des communes a mené sa barque à sa façon, mais à Lormes le dispositif a agi comme un déclic ».

Un grand remue-méninges collectif

Dès 2016, un important travail de diffusion est mené pour informer les habitants de cette commune de 51,71 km², plus vaste que Lyon (47,87 km²), mais très peu densément peuplée (26,17 habs/km²). Commence alors « un grand remue-méninges collectif », poursuit l’élu. Accompagnés par un cabinet d’architectes, l’Atelier Correia, et une troupe de théâtre, Le Cri Dévot, les habitants se retrouvent lors d’événements, de discussions et de festivités… Ils font part de leurs envies, de leurs projets, échangent, et très vite s’engagent dans des chantiers participatifs.

Après dix-huit mois d’élaboration, le plan guide de Lormes est adopté. Le passage à l’acte devra se faire de deux manières : d’abord en agissant très rapidement pour que les propositions des habitants soient immédiatement suivies d’effet ; ensuite en réfléchissant à des investissements à moyen et long terme. Dont acte : Ocrement, l’un des premiers chantiers participatifs a consisté à repeindre les volets des maisons situées dans la rue commerçante Paul-Barreau. Mené tambour battant lors d’un week-end, ce « chantier ocre » a rassemblé de très nombreux participants et donné un coup de neuf au village. Surtout, les habitants ont pu mesurer la force de l’action collective.

Afin de renforcer son projet de long terme, la municipalité de Lormes s’engage en 2020 dans le dispositif Petites villes de demain, « qui s’est connecté avec Petites villes du futur, » précise Christian Paul. Programme qui a permis le financement d’un poste de chef de projet pendant cinq ans, et facilite l’accès aux financements de l’État, « même si ce point peine à se concrétiser », note l’élu.

Remettre sur le marché logements et commerces fermés

Des actions de long terme sont en cours. Une concession d’aménagement a été signée en 2021 avec la Société d’économie mixte (Sem) Nièvre aménagement, afin d’acheter, rénover et remettre sur le marché des commerces fermés ou des bâtiments vétustes du centre historique. « Nous achetons à l’euro symbolique des immeubles qui menacent de s’effondrer ; nous sommes devenues gestionnaires de ruines », sourit Christian Paul.

Ce programme d’acquisition-déconstruction a permis de démolir partiellement un ancien garage du centre-ville pour y aménager à la fois une « boîte » où accueillir un nouveau commerce, mais aussi un passage public végétalisé où les habitants ont réalisé, lors d’un autre chantier participatif, du mobilier urbain (tables et chaises) avec des matériaux recyclés. Presque en face, à la place d’un autre immeuble déconstruit, sera créée une halle couverte, futur espace public qui accueillera marchés de producteurs, fêtes et autres rassemblements. Objectifs : embellir, dédensifier et végétaliser le centre, et libérer des locaux pour des activités économiques et culturelles. Car séduits par l’effervescence et le dynamisme collectif de la commune, de nombreux artistes sont venus s’installer ces dernières années, ouvrant une dizaine de galeries et multipliant les portes ouvertes et autres rencontres publiques.

À noter que ce temps de réflexion induit par le processus de concertation a permis aux élus de mobiliser d’autres fonds publics : le fonds Friche, ainsi que ceux liés au label Fabrique de territoire.

Une quinzaine de tiers lieux publics ou privés

Aujourd’hui, une quinzaine de tiers lieux publics ou privés ont ouvert ou sont sur le point de le faire. Sont portés par la municipalité : la mission numérique qui propose coworking, pépinière de start-up et développement numérique pour les habitants ; l’espace Territoire zéro chômeurs, lieu de rencontres pour les non-salariés ; les lieux multi-activités ; ou encore la Manufacture de proximité, un « makerspace » où fin 2022 des artisans, artisans d’art, stagiaires, etc. pourront partager des outils et des machines pour travailler le bois, le métal ou le verre, et ceci toute l’année. Dans l’Ehpad, une cuisine partagée permettra bientôt aux résidents et à leurs proches de préparer des plats, des confitures ou des produits transformés, ceci à côté d’une microbrasserie, le tout grâce à des financements délivrés par la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA).

100 nouvelles familles installées depuis 2019

À côté de ces projets publics, de jeunes entrepreneurs ont repris des restaurants (licence IV) et autres locaux, et des artistes ont créé ateliers et galeries. Ce bouillonnement soudain créé une belle émulation dans le village, aujourd’hui rafraîchi par les nouvelles devantures colorées et animé par les 100 nouvelles familles installées depuis 2019. Des citadins surtout, vivant ici de façon permanente, en résidence secondaire ou en bi résidence. Tous ces chantiers participatifs et animations ont permis aux anciens et aux nouveaux habitants de faire connaissance et de s’accepter… ce qui ne va pas toujours de soi. « L’habituelle dichotomie s’est adoucie, note la directrice générale des services, Justine Bouteille-Maréchal. C’est la méconnaissance entre les personnes qui crée de la méfiance ; là, le fait de réfléchir, de dialoguer et travailler ensemble a permis de fédérer les forces vives. Et d’embarquer les élus et les agents communaux dans un projet collectif, ce qui a permis à tous de se l’approprier beaucoup plus rapidement. Aujourd’hui, les Lormois sont fiers de leur commune. »

Côté élus, la démarche Petite ville du futur a été « une véritable révélation, note Christian Paul. Auparavant, ils travaillaient trop souvent tous seuls et au fil de l’eau. Ce processus collectif a entraîné un changement de posture. » Cet élu qui a occupé la plupart des fonctions politiques au cours de sa carrière, conclut : « Pour finir cela a permis de réhabiliter l’action communale sans appauvrir l’intercommunalité ».

Le point sur les soutiens du projet

Étude Petite ville du futur : 40 000 €

dont 30 000 € financés par le Pays Nivernais-Morvan, 10 000 € par la commune de Lormes

Investissement humain

Chargée de mission petite ville de demain : 32 000 € par an sur 6 ans financés à 80 % par l'État.

Chargé de mission tiers lieux : 45 000 € par an sur 3 ans financé à 100 % par l'État dans le cadre du programme « Fabrique de territoire ».

Pendant l'étude « petite ville du futur », soit 3 ans, l’investissement du secrétariat général a représenté un quart-temps d'ingénierie : soit 45 000 pendant 3 ans, pris en charge par la commune.

Commune de Lormes

Nombre d'habitants :

1264
1 place François-Mitterrand
58 140 Lormes
contactmairielormes@lormes.fr

Christian Paul

Maire

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