Développement des territoires - Attractivité : le député Philippe Kemel propose d'accroître le rôle des régions
Confier aux régions les compétences en matière d'attractivité économique des territoires. C'est l'idée du député SRC du Pas-de-Calais Philippe Kemel. A l'occasion des discussions autour du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République (Notr), en commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale, il a fait adopter, le 3 février 2015, un amendement leur conférant explicitement ces compétences. Objectif : améliorer la visibilité des actions à destination des investisseurs étrangers et éviter les doublons, voire les empiètements.
Ainsi, le projet de loi Notr qui va être discuté en séance publique à l'Assemblée nationale à partir du 17 février précise désormais que le schéma régional de développement économique, d'innovation et d'internationalisation définit les orientations en matière d'aides aux entreprises, de soutien à l'internationalisation et d'aides à l'investissement immobilier et à l'innovation des entreprises mais aussi "les orientations relatives à l'attractivité du territoire régional".
Dans un autre amendement, le député souhaitait également ajouter dans l'intitulé du schéma régional la notion d'investissements. Mais l'amendement a été retiré, la commission ayant considéré que la notion de développement économique, d'innovation et d'internationalisation, présente dans l'intitulé, recouvrait forcément la notion d'investissements.
Les régions, "front office" de l'attractivité
L'idée de confier la responsabilité de l'attractivité aux régions est une des principales recommandations du rapport que Philippe Kemel a présenté le 4 février en commission des affaires économiques, dans le cadre de la mission d'information commune sur les investissements étrangers en France. "Dans ces opérations d'accueil, les régions jouent un rôle de premier plan", y plaide-t-il. Le rapporteur imagine une répartition des rôles entre la nouvelle agence Business France, issue de la fusion entre l'Agence française des investissements internationaux (Afii) et Ubifrance, chargée du "back office", c'est-à-dire de la cohérence nationale des actions, et celui des régions qui assureraient le "front office", le contact direct avec les investisseurs.
Contrairement aux idées reçues, le député assure ainsi que les investisseurs étrangers se plaignent moins de l'environnement juridique, fiscal et social de la France que du manque de lisibilité et de stabilité, et de la multiplicité des acteurs. Une démarche de simplification, conférant aux régions le domaine de l'attractivité avait été initiée en 2014 par Nicole Bricq, alors ministre du Commerce extérieur, à travers des conventions de coopération signées entre les régions, leurs agences de développement et l'Afii. Pour le député du Pas-de-Calais, il faut que les régions puissent être représentées au conseil d'administration de la nouvelle agence Business France et qu'elles aient un cadre conventionnel avec cette agence.
Se basant sur les données de la Banque de France, le rapport de Philippe Kemel fait également le point sur les investissements étrangers en France qui se sont élevés à 12,7 milliards d'euros en 2013, contre 12,3 milliards d'euros en 2012. La France accueille sur son sol le quatrième stock mondial d'investissements étrangers entrants. Elle se place dans ce domaine derrière les Etats-Unis, le Royaume-Uni, Hong-Kong mais devant l'Allemagne. Au total, quelque 20.000 entreprises sont contrôlées en France par des groupes ou des intérêts étrangers. Elles emploient environ 12% des salariés. "Dans neuf régions, les entreprises sous contrôle étranger réalisent, à elles seules, plus de la moitié (Alsace) ou plus du tiers du chiffre d’affaires de l’industrie manufacturière (Bourgogne, Centre, Haute-Normandie, Lorraine, Nord-Pas-de-Calais, Picardie, Provence-Alpes-Côte d’Azur et Rhône-Alpes)", rappelle le député.
Le crédit impôt recherche loué en permanence
Chaque année depuis la crise économique de 2008, en moyenne, 700 projets d'investissement étranger ayant un impact sur l'emploi sont accueillis sur le territoire français. Le gouvernement souhaite faire passer ce chiffre à 1.000 par an d'ici 2017.
Parmi les atouts du territoire français : les infrastructures, le système logistique, et le crédit d'impôt recherche. Ce dernier dispositif "a été loué en permanence", a indiqué Philippe Kemel, lors de la présentation de son rapport. "C'est souvent parce qu'il y a le crédit impôt recherche que les entreprises viennent s'implanter sur notre territoire." D'après le rapport, si la France se situe assez loin de la Suède et de l'Allemagne en matière de R&D, elle maintient un des plus hauts niveaux d'aides publiques à l'innovation : cet effort dépassait 6 milliards d'euros en 2012, le crédit d'impôt recherche représentant au moins les trois quarts du montant. "Un tel engagement constitue un puissant appel aux investissements étrangers, spécialement pour conserver et développer des centres de recherche en France", souligne ainsi le rapport.
Au-delà des compétences confiées aux régions, le rapport préconise de mener à bien la fusion entre l'Afii et Ubifrance, de définir un programme de travail au Conseil stratégique de l'attractivité, et de mettre en oeuvre une politique concertée pour améliorer l'image internationale de la France, en particulier en matière économique, dans la continuité de la mission de réflexion menée en 2013 sur la "Marque France". Il propose enfin d'engager un plan d'action destiné à renforcer les facteurs d'attractivité de la France pour établir des sièges sociaux et des centres de décisions de groupes étrangers. Les implantations dans cette nature ont tendance à s'essouffler.