Assemblée nationale : la délégation aux collectivités entend peser dans les débats

Financement du régime de retraite des fonctionnaires territoriaux, statut de l'élu, fermetures de classes, qualité de l'eau, mobilités… le député Stéphane Delautrette a présenté à la presse, ce 5 mars, la feuille de route de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation qu'il préside depuis octobre. La délégation souhaite "être force de propositions" sur tous ces sujets.

La question du financement de la Caisse nationale de retraites des agents des collectivités locales (CNRACL) sera "un des fils conducteurs de l'action de la délégation dans les prochaines semaines", a indiqué le président (PS) de la délégation, qui succède à l'ex-député (Renaissance) David Valence.

Pour combler le déficit du régime de retraites des fonctionnaires territoriaux et hospitaliers, il existe "peut-être un autre chemin" que celui de la hausse de cotisations de douze points sur quatre ans des cotisations vieillesse dues par les employeurs territoriaux, estime l'élu. D'autant que, selon lui, la voie choisie par le gouvernement alourdira le coût des emplois de fonctionnaires et, donc, pourrait encourager les collectivités à privilégier l'embauche de contractuels, qui cotisent à l'Ircantec. Avec à la clé de moindres recettes pour la CNRACL. Pour faire le point et "objectiver" le sujet, la délégation auditionnera dans les prochaines semaines ses principaux acteurs : le président de la CNRACL, Jean-Pierre Cazenave (le 12 mars), les représentants des employeurs territoriaux (le 26 mars) et ceux des syndicats représentatifs de fonctionnaires (le 2 avril). La délégation entend aboutir à "une proposition de sortie" de la situation déficitaire dans laquelle se trouve aujourd'hui la caisse de retraites.

Rendez-vous avec Élisabeth Borne 

La délégation a par ailleurs acté la création de deux missions d'information. L'une, sur les conséquences pour les collectivités de la directive cadre européenne de décembre 2020 sur la qualité des eaux destinées à la consommation humaine, est déjà active, sous la houlette de Gabriel Amard (LFI) et de Jean-Michel Brard (Horizons). La seconde, qui n'a pas encore débuté ses travaux, s'intéressera aux questions de gouvernance et de financement des mobilités, avec pour rapporteurs le député (Gauche démocrate et républicaine) Nicolas Sansu et sans doute un député du bloc central. La mission d'information aura du grain à moudre, selon le président de la délégation. "La possibilité conférée aux régions par la loi de finances pour 2025 de lever un versement mobilités régional "est une avancée notoire", qui "pour autant ne résout pas la question du financement de la mobilité, notamment pour les grandes villes", pointe-t-il.

Autre dossier sensible dont la délégation s'empare : celui des fermetures de classes et des remplacements de professeurs. Avec son homologue du Sénat – le centriste Bernard Delcros – le président de la délégation de l'Assemblée nationale rencontrera le 12 mars la ministre de l'Éducation nationale, Élisabeth Borne, pour évoquer ces sujets. Stéphane Delautrette compte aussi aborder à cette occasion la question de "l'accompagnement des élèves sur le plan psychologique et, en, parallèle, en termes de pédagogie". "On identifie de plus en plus des besoins d'accompagnement" dans ces domaines, pointe Stéphane Delautrette. Or, les réseaux d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (Rased) qui avaient été constitués pour répondre à ces enjeux "ont été vidés de leur substantifique moelle. Il n'y a plus les effectifs sur les territoires", déplore-t-il. 

Besoin de "visibilité pluriannuelle"

Sur le statut de l'élu, sujet dont l'Assemblée nationale débattra au mois de mai – en se saisissant de la proposition de loi que le Sénat a adoptée en mars 2024 –, la délégation aux collectivités a déjà déposé sa contribution. C'était le 12 février dernier, sous la forme d'un rapport présentant les positions des différents groupes politiques et concluant que l'amélioration des conditions d'exercice des mandats locaux fait l'objet d'un "quasi-consensus politique" chez les députés (voir notre article). Pour favoriser "l'engagement" dans la vie publique locale, Stéphane Delautrette a aussi plaidé ce 5 mars, pour que les élus locaux bénéficient de "visibilité pluriannuelle". On ne doit pas "changer les règles en permanence", pointe-t-il. C'est d'autant plus important qu'à l'approche de la campagne pour les élections municipales, les candidats "vont prendre des engagements sur un programme", souligne-t-il.

Cette visibilité attendue par les élus doit notamment être financière, estime le président de la délégation. Qui l'assure : avec ses collègues, il débutera "rapidement" le travail de préparation du projet de loi de finances pour 2026

› Réforme du mode de scrutin "PLM" : "trois situations différentes"

La proposition de loi réformant le mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille (voir notre article), qui sera débattue dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale à partir du 20 mars, pourra-t-elle répondre aux enjeux électoraux de trois grandes villes aux "situations différentes" ? Stéphane Delautrette s'exprime sur le sujet à titre personnel et se montre dubitatif. 

Le député, qui sera responsable du dossier au sein du groupe socialiste, a noué de premiers contacts avec des élus des villes concernées. "Depuis les lois Defferre, on a trois collectivités qui ont évolué de manière totalement différente", observe-t-il. Il s'interroge : "Peut-on répondre, à travers un seul texte, à trois situations aussi différentes ?" "À Lyon, le problème est dans l'actualisation des données démographiques des arrondissements et dans l'organisation de trois scrutins le même jour", indique-t-il. À Marseille, les acteurs locaux ont manifesté "un intérêt à faire évoluer les choses", mais cela ne veut pas dire que la proposition de loi répondra à ces attentes, poursuit-il. En précisant : "Peut-être que le rapporteur ne verra pas l'intérêt de cette évolution (…) à Marseille, parce que, ce qu'il y a dans le viseur, c'est une évolution sur Paris. C'est un jeu extrêmement compliqué".

Ces questions-là mériteraient "plus de temps" que ne le prévoit le gouvernement, estime le député de Haute-Vienne. "À un an de l'échéance municipale, je ne sais pas si c'est prématuré ou trop tard, mais ce n'est pas le bon moment", critique-t-il.

 

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