Alsace : le débat s'agite, Jacqueline Gourault écarte tout "démembrement de la région Grand Est"
En Alsace, revigorée par la création de sa nouvelle collectivité, les attaques contre la région Grand Est sont reparties de plus belle à la faveur d'une petite phrase de Jean Castex. De passage samedi à Colmar, au siège de la toute récente Collectivité européenne d'Alsace (CEA), le chef du gouvernement a fait des heureux en déclarant n'avoir "jamais été convaincu" par la création d'"immenses régions". Et dès lundi, le nouveau président LR de la CEA, Frédéric Bierry, déclarait souhaiter "le démembrement de la région Grand Est", évoquant "une demande récurrente" en Alsace (voir notre article du 25 janvier).
Soutenu par sept élus régionaux, Frédéric Bierry a ensuite rapidement été rejoint par le maire LR de Colmar, Éric Straumann, qui, dans un courrier à Jean Castex, a souligné que la création de la CEA ne constituait qu'"une première étape" vers la transformation du "territoire alsacien en collectivité régionale". Le sénateur de la Moselle Jean-Louis Masson (non-inscrit) a applaudi ces déclarations, proposant que les trois anciennes régions élisent séparément leurs élus régionaux, mais son amendement a été rejeté mardi. Et, sans surprise, le parti autonomiste alsacien Unser Land a demandé "des actes" et "l'établissement d'une feuille de route précise pour la sortie du Grand Est".
"Chacun marque son territoire en vue des prochaines élections" régionales et départementales, résume le politologue strasbourgeois Richard Kleinschmager, interrogé par l'AFP. "En Alsace, le thème de l'opposition au Grand Est est toujours populaire, cela reste un thème d'entraînement", considère également Bernard Schwengler, docteur en sciences politiques et chercheur à l'Observatoire de la vie politique en Alsace (Ovipal). Il note toutefois que c'est "en grande partie un débat interne à LR". La résurgence de ce débat met en lumière la "situation un peu hybride" de la CEA qui a récupéré le 1er janvier les compétences des deux anciens départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin, mais également de nouvelles compétences comme la coopération transfrontalière, synthétise Richard Kleinschmager. "Deux départements se sont associés et se positionnent comme concurrents de la région dont ils font partie".
La réponse du gouvernement ne s'est pas fait attendre. Mardi, la ministre de la Cohésion des territoires, Jacqueline Gourault, a affirmé à l'Assemblée nationale, en réponse à une question du député du Haut-Rhin Sylvain Waserman (Modem) qu'il n'y aurait "pas de remise en cause des périmètres actuels des régions, comme le Premier ministre l'a dit lui-même" lors de sa visite en Alsace. "Pas de démembrement de la région Grand Est, pas de collectivité à statut particulier", a-t-elle ajouté, rappelant le "cadre précis" dans lequel est née la CEA.
"Fermez le ban. Poursuivons notre travail", a réagi sur Twitter Jean Rottner, diffusant la réponse de Jacqueline Gourault.
Côté lorrain et champenois, le retour des velléités alsaciennes a aussi fait grincer des dents. Le député LREM de Moselle Christophe Arend a estimé qu'un éventuel élargissement de la CEA devait répondre à deux conditions : "permettre aux autres collectivités de la région Grand Est de bénéficier des mêmes prérogatives", et que cela ne se fasse "pas au détriment des prérogatives régionales".
Le maire LR de Reims, Arnaud Robinet, avait lui jugé "tout simplement incompréhensible" qu'un "tel débat" soit rouvert maintenant. Son collègue de Metz, François Grosdidier (LR), a lui écrit au président de la République pour lui demander de "faire part le plus rapidement possible" de sa position.