Aides au bio : l'Etat s'en remet aux régions et au marché
En plein Etats généraux de l'alimentation, la mesure est un signal inquiétant pour la filière bio. Le ministre de l'Agriculture Stéphane Travert a annoncé, mercredi 20 septembre, que l'Etat allait cesser ses aides bio "au maintien" dès 2018 afin de se recentrer sur les aides à la conversion… Les aides au bio (conversion et maintien) relèvent aujourd'hui du Feader (second pilier de la PAC) et sont gérées directement par les régions depuis 2014. Mais ces crédits européens sont complétés par des crédits de l'Etat et des régions (en fonction de leurs priorités). C'est l'abondement de l'Etat concernant les aides au maintien qui va disparaître.
En visite au salon Tech et Bio à Bourg-lès-Valence (Drôme), le ministre a jugé que "c'est au marché de soutenir le maintien de l'agriculture biologique", étant donné la "croissance historique" de la consommation des aliments bio en 2016 (+20%). Les résultats affichés par l'Agence bio vendredi dernier attestent en effet de la bonne santé de la filière au premier semestre 2017, avec 3.000 nouvelles fermes passées en bio.
Cependant l'Etat s'engage à honorer jusqu'en 2020 "les contrats pluri-annuels signés cette année" et précise que le crédit d'impôt dont bénéficient les producteurs bio sera prolongé au-delà de 2017 alors qu'il devait être supprimé. Le ministre a aussi suggéré la mise en place d'un "fonds privé" pour "financer des projets de développement et de structuration des filières bio", et dit compter sur les Etats généraux de l'alimentation pour élaborer des "propositions concrètes" sur le sujet.
Le ministre a aussi annoncé l'objectif de faire augmenter l'emprise de l'agriculture bio à "8,5% des surfaces agricoles utilisables" d'ici 2020, soit d'ici la fin de la programmation actuelle de la PAC, contre 6,5% en 2016.
De leur côté, les régions ont souhaité "unanimement" mardi conserver la gestion du Feader lors d'un Comité Etat-régions, fait-on valoir au ministère. "Les régions pourront continuer de financer des aides au maintien sur de nouveaux contrats mais elles devront le faire en responsabilité et sans mobiliser les crédits du ministère", a résumé le ministre mercredi.
"C'est à ne plus rien comprendre, toutes les conditions sont réunies pour faire de la bio un succès collectif français, et c'est ce moment que choisit l'Etat pour se retirer alors que nous avons besoin d'un soutien public fort", s'est offusquée Stéphanie Pageot la présidente de la Fnab (Fédération nationale de l'agriculture biologique) dans un communiqué du 21 septembre. "En annonçant un objectif politique en dessous du niveau du marché, qui prévoit 10% de surfaces agricoles utiles bio dès 2020, le ministre de l'Agriculture a surpris tout le monde", insiste la Fnab.
Ce nouveau coup dur pour la filière intervient alors que les aides de 2015 et 2016 n'ont toujours pas été versées (même si des avances ont été mises en place), l'Etat et les régions se renvoyant dos à dos sur le sujet depuis des mois… Bien plus, les programmes régionaux du Feader n'avaient pas anticipé le rythme actuel des conversions et dans nombre de régions les enveloppes sont virtuellement épuisées (sur le sujet voir ci-dessous notre article du 15 septembre 2017). Des plafonds ont dû être mis en place.