Plouhinec : de la création à l’hébergement solidaire, un tiers-lieu protéiforme (29)

Quelque 17 000 m2 de bâti, 15 artisans ou collectifs d’artisans, trois structures du centre intercommunal d’action sociale (Cias), 84 places d’hébergement et un foisonnement d’activités solidaires, culturelles, ou de sensibilisation aux enjeux écologiques… En à peine trois ans, les ateliers Jean-Moulin, ouverts en juillet 2019, sont devenus un lieu clé pour la revitalisation territoriale de Plouhinec, petite ville du Finistère.

À la manœuvre, un binôme d’« ensembliers » - le collectif Nouvelle Imagerie et la coopérative Plateau urbain - retenus via un appel à candidatures de la région Bretagne, propriétaire des lieux. Le tiers lieu qu’ils imaginent se structure en une association, l’association d’animation des Ateliers Jean Moulin (A3JM) intégrant des élus de la commune et de la communauté de communes Cap Sizun-Pointe du Raz au sein de son conseil d’administration et de son bureau. Une « gouvernance partagée », atout majeur pour la cohérence des projets développés au sein des ateliers, commente Françoise Maine, membre de Nouvelle Imagerie et coordinatrice des lieux.

« Les débuts n’ont pourtant pas été évidents », se souvient Solène Julien Le Mao, première adjointe au maire. Car « les ateliers sont nés de la fermeture du lycée professionnel de la ville, difficilement vécue par les habitants. Et dans notre commune rurale, un tiers lieu c’était quelque chose de mal identifié, d’assez opaque. »

Il a fallu un peu de temps pour… s’apprivoiser. Faire face, aussi, au départ de deux associations qui s’étaient installées aux ateliers suite à l’appel à candidatures – un peu tôt, le projet des lieux se construisant encore.

Pour travailler celui-ci en fonction des besoins locaux, et créer du lien, « des rencontres de voisins, et un projet nommé Mémoire d’image, autour des souvenirs du lieu de chacun, ont été organisés », explique Françoise Maine. Du dialogue avec le territoire ont émergé trois besoins majeurs : des locaux abordables pour les artisans, de l’hébergement saisonnier accessible, et un mix entre ingénierie culturelle et actions solidaires.

« Les actions de solidarité organisées aux ateliers ont aussi aidé à l’appropriation du lieu, notamment depuis la crise Covid. Centre de vaccination, point de collecte des dons pour l’Ukraine… les gens sont entrés dans les ateliers et se sont rendu compte de tout ce qui s’y jouait », souligne Solène Julien Le Mao.

24 emplois créés

« Les ateliers, c’est aujourd’hui 24 emplois, 4 au sein d’A3JM et 20 dans les 16 structures accueillies », indique Françoise Maine. Quinze structures artisanales y sont en effet installées, leurs candidatures ayant été approuvées par une commission d’A3JM, associant élus et animateurs des ateliers. Collectif d’architectes et charpentiers de marine, sculpteur sur métal, fabricant de planches de surf en bois, etc. Tous cohabitent, et le partage d’espaces communs, comme l’espace restauration, stimule les projets collaboratifs. Grâce à leur venue, et à la pratique de leurs activités de niche, dont nombre font écho à des savoir-faire locaux, « le territoire retrouve des compétences qu’il n’avait pas ou plus », commente Solène Julien Le Mao.

Le secours alimentaire du Cias est aussi présent, rejoint cet été par la friperie et l’épicerie solidaire intercommunales. Une brique sociale forte, qui permet à ceux qui en ont besoin, de ne pas juste venir chercher un colis, mais aussi de flâner, d’échanger… souligne l’adjointe au maire.

Solidarités

Le tiers lieu abrite aussi 84 places d’hébergement à tarifs abordables, répondant à un manque jusque-là très fort sur le territoire, ajoute-t-elle. « Avec 66 lits en dortoirs, par chambres de 2, c’est le plus gros hébergement de groupe de Cornouaille. Cet été, 27 nageurs sauveteurs de la SNCM y logeaient. S’y ajoutent 18 chambres individuelles en appartements partagés pour saisonniers, services civiques, apprentis… », indique Françoise Maine.

Il accueille aussi événements culturels, tournages ciné ou vide-greniers… Et développe des actions d’éducation à la transition écologique, allant du potager cogéré avec les habitants, à l’atelier de fabrication de séchoirs solaires.

« Espace pluriel, situé sur le port, c’est un atout fort pour le dynamisme du quartier de la criée de la commune, labellisée Petite ville de demain avec sa voisine Audierne », souligne Solène Julien Le Mao. Si le modèle économique des ateliers reste à consolider, ils sont, déjà, « un formidable laboratoire de travail et d’innovation pour les collectivités locales », ajoute Françoise Maine. Récemment labellisé « Manufacture de proximité », le tiers lieu devrait devenir un pôle ressource et de production autour du bois pour le territoire.