Disponibilités en bois, bilan carbone : une étude livre des trajectoires d'évolution de la forêt en 2050 et au-delà

Dans une étude prospective inédite publiée ce 14 mai, l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et l'Institut technologique FCBA (Forêt Cellulose Bois-Construction) présentent différentes trajectoires d'évolution conjointe de la ressource forestière dans l'Hexagone et du bilan carbone intégré de la filière forêt-bois aux horizons 2050 et 2080. Ces projections s'appuient sur différents scénarios concernant notamment les niveaux de récolte, les effets du changement climatique et le renouvellement des peuplements forestiers.

Alors que les orientations pour atteindre la neutralité carbone en 2050 sont attendues, notamment à travers la Stratégie nationale bas carbone (SNBC) en cours de révision, l'Institut national de l'information géographique et forestière (IGN) et l'Institut technologique FCBA (Forêt Cellulose Bois-Construction) ont publié ce 14 mai une étude prospective qui entend contribuer à la réflexion actuelle. La forêt et le bois jouent en effet un rôle majeur dans l'atténuation du changement climatique, qu'il s'agisse de la séquestration de carbone dans les écosystèmes forestiers, du stockage de carbone dans les produits bois ou de l'évitement d'émissions de gaz à effet de serre (GES). 

L'étude, qui a été réalisée avec le soutien des ministères de la Transition écologique et de l'Agriculture et de l'Ademe simule diverses trajectoires d'évolution conjointe de la ressource forestière hexagonale et du bilan carbone intégré de la filière forêt-bois aux horizons 2050 et 2080 en tenant compte notamment de différents scénarios concernant notamment les niveaux de récolte, les effets du changement climatique et le renouvellement des peuplements forestiers. Ses principaux résultats sont présentés dans une synthèse de quatre pages qui fait ressortir plusieurs grands enseignements, tout en appelant à poursuivre les recherches et expertises intersectorielles.

Complémentarité amont-aval

Le premier insiste sur le caractère essentiel de la complémentarité amont-aval "pour maximiser le bilan carbone forestier". "Le rôle de la filière est d’autant plus important si le climat se dégrade", souligne l'étude. L’enjeu est d’assurer un "développement cohérent (…), poursuit-elle. D’une part en investissant dans les usages à longue durée de vie (y compris pour les feuillus et bois de crise), qui ont un effet très fort sur le bilan carbone, tout en améliorant le recyclage, la réutilisation et le réemploi. D’autre part en préservant une production de bois dont la quantité comme la qualité favorise la performance de la filière". "L’équilibre entre les composantes du bilan carbone requiert des choix de société et des arbitrages politiques à visée de long terme, probablement spécifiques selon les territoires, et qui pourraient amener à passer d’une logique visant une augmentation du puits à celle visant un pilotage par les stocks de carbone", préconise-t-elle.

Dépasser le seul enjeu du bilan carbone

Autre nécessité : prendre en compte les enjeux multiples de la forêt et du bois, qui dépassent le seul bilan carbone (dimension économique, sociale et environnementale, emploi dans les territoires ruraux). "Les conditions d'une hausse de la récolte de bois reposent notamment sur une ambition forte de massification de la gestion en forêt privée, relèvent aussi les auteurs de l'étude. Elles nécessitent également de prendre en compte les enjeux de biodiversité tant au niveau des pratiques de gestion que des surfaces protégées." 

Développer la culture du risque

"Si le secteur forêt-bois contribue à la lutte contre le changement climatique, il est également fragilisé par ses effets", mettent aussi en garde les experts qui estiment que l'adaptation qui "doit concerner de façon conjointe l'amont, l'aval et la société" devient "un enjeu majeur et même la condition au stockage de carbone". "La forte sensibilité du bilan carbone aux effets du climat souligne l’enjeu du développement d’une culture du risque, via la protection de la vitalité des forêts, l’adaptation sur le temps long, la réactivité tant de la gestion forestière que de la filière bois lors des crises, ajoutent-ils. En forêt, le renouvellement par des essences compatibles avec les conditions futures et l’évolution des pratiques sylvicoles visant à ajuster la récolte à l’état des peuplements ou à abaisser le risque, sont des mesures d’adaptation essentielles." Les auteurs de l'étude préconisent des réponses "diversifiées et parfois expérimentales, selon les situations rencontrées", leur mise en œuvre devant "tenir compte du temps long des dynamiques forestières et reposer sur un système de monitoring régulier et précis". "L’évolution des modalités de production et des comportements de consommation constituent aussi des leviers dans l’adaptation, notamment pour développer l’usage des bois de crise, des feuillus en matériau, le recyclage, etc.", ajoutent-ils.