L'objectif de 100 foncières de redynamisation presque atteint

84 foncières de redynamisation ont été créées depuis leur lancement, dont 75 sont en pleine activité. À l'occasion d'un séminaire organisé le 10 septembre 2024 par le Hub des Territoires pour les trois ans du réseau national des foncières de redynamisation, un bilan flatteur de leur activité et un point sur leurs perspectives ont été dressés. Soutien au développement des maisons de santé, à l'artisanat, voire aux activités industrielles, les foncières semblent avoir de l'avenir.

"On reproche souvent aux élus de créer des trucs qui ne marchent pas, là le potentiel de développement va vite. On nous reproche de mal utiliser l'argent, pour 150 euros d'argent public, on lève 1.000 euros, soit un effet multiplicateur de 7 !" C'est le témoignage appuyé de Stéphane Pfeiffer, adjoint au maire de Bordeaux, chargé de l'urbanisme résilient, du service public de l'habitat et de l'économie sociale et solidaire, président d'InCité, société d'économie mixte (SEM) créée pour intervenir dans les domaines du logement et de l'urbanisme publics. Il s'exprimait le 10 septembre lors d'un séminaire organisé par le Hub des Territoires, à l'occasion des trois ans du réseau national des foncières de redynamisation créé en juillet 2021 à l'initiative de la Fédération des élus des entreprises publiques locales (FedEPL) et de la Banque des Territoires.

"84 foncières ont été créées sur l'objectif de 100, dont 75 sont vraiment dans une activité pleine et entière, c'est-à-dire qu'elles déploient leur plan d'affaires, a précisé Michel-François Delannoy, directeur du département appui aux territoires à la Banque des Territoires. Les configurations sont très différentes selon les territoires, avec des outils parfois communaux, intercommunaux, à l'échelle départementale ou encore régionale."

270 millions d'euros déjà investis

Côté budget, 270 millions d'euros ont d'ores et déjà été investis sur une enveloppe prévue de 300 millions d'euros. Créées sous l'impulsion du plan de relance pour favoriser la redynamisation des centres-villes (voir notre article du 14 février 2022), les foncières se développent un peu partout en France. Elles ne couvrent toutefois pas tout le territoire. "L'outil ne fait pas le projet, a insisté Michel-François Delannoy. Il faut d'abord qu'il y ait de la part des élus une vision assez précise de ce que l'on veut faire pour redynamiser." Même avis du côté de Philippe Laurent, président de la Fédération des EPL. "Il faut que ce soit porté politiquement, que le maire s'engage", a-t-il affirmé lors d'un point presse organisé en parallèle de la rencontre. "Il y a des foncières régionales, comme en Occitanie ou en Bretagne, des foncières départementales, comme dans les Landes, mais le point de départ c'est la demande et la volonté", a également insisté Olivier Sichel, directeur de la Banque des Territoires. À l'heure actuelle, près de 3.000 locaux commerciaux ou d'activités dans le cadre de ces foncières disposent d'un plan d'affaires et un millier de locaux ont été livrés, dont 200 correspondent à des créations nettes.

Une capacité à favoriser l'artisanat

À Bordeaux, la foncière a été créée en 2019 pour accompagner les communes les plus éloignées du centre. "Il y avait aussi une volonté d'avoir une activité contracyclique, le centre étant hyperspécialisé avec surtout des bars et des restaurants, et de travailler à la diversification, pour installer des commerces indépendants", a expliqué Stéphane Pfeiffer. Autre enjeu pour la foncière : favoriser l'artisanat. "L'objectif de départ est de 15.000 m2 à produire d'ici 2030, on pense qu'on les aura signés l'année prochaine, a assuré fièrement l'élu. Avec 7 millions d'euros, nous avons 25 à 30 millions d'investissement, et une diversité d'activités, artisanat, commerce, un peu de santé notamment dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville, ce qui ne représente pas les projets les plus faciles à monter." L'idée est d'aller chercher des subventions et de faire attention à ne pas intervenir que sur la ville centre. "Il ne faut pas s'interdire aussi d'aller sur des opérations lucratives, a ajouté Stéphane Pfeiffer, car elles nous ramènent de l'argent pour financer des opérations moins rentables. Il y a une vraie logique de péréquation à l'échelle de l'activité de la foncière, on arrive par exemple à préserver une librairie indépendante à Bordeaux qui à l'origine n'avait pas la capacité de rester en centre-ville."

La durée comme atout

À Chambéry (Savoie), la foncière a notamment permis de créer le premier café-théâtre de la ville, inauguré le 6 septembre. Le lieu compte 160 places. Il a déjà trouvé son public. "Lorsqu'on laisse faire, avec liberté et autonomie et des outils appropriés, on arrive à des résultats, avec sérénité, a détaillé Olivier Sichel. Tout cela plaide pour une forme de décentralisation, pas que juridique, une forme de confiance qu'il faut faire aux acteurs locaux."

La notion de long terme, instaurée notamment par le soutien de la Banque des Territoires, joue aussi beaucoup. "Ce sont des politiques qui s'inscrivent dans une durée très longue, nous avons besoin de gens qui pensent à long terme et on en a de moins en moins", a insisté Philippe Laurent.

Attention toutefois à ne pas créer les conditions d'une spéculation sur les biens. "La foncière met de l'argent public pour favoriser des loyers pas chers, une façon d'aider les entreprises, mais elles peuvent aussi générer un droit au bail à revendre !", a indiqué Stéphane Pfeiffer.

Un avenir assuré pour les foncières ?

Autre risque : l'effet déceptif, avec des attentes très fortes des maires qui ne peuvent pas toutes être assouvies. "On a pu accompagner des élus pour aboutir au constat que l'outil ne fonctionnerait pas", a concédé Michel-François Delannoy.

L'avenir de ces foncières semble toutefois assuré. "Nous allons continuer à en développer là où il y a des initiatives, a-t-il précisé. Il y a encore une douzaine de foncières dans le vivier, déjà bien engagées dans le travail préalable nécessaire avant de venir les capitaliser, et encore une quinzaine qui en sont à l'étude de faisabilité." 

Parmi les activités de proximité que les foncières pourraient être amenées à développer davantage : les maisons de santé, l'artisanat, et globalement toutes les activités privées qui participent à la dynamisation des centres, voire les activités industrielles.