14 Juillet : annulations en cascade de feux d'artifice et sécurité renforcée
"Raisons de sécurité", "indisponibilité des services de secours"… de Nanterre à Roubaix, plusieurs feux d'artifice prévus pour la Fête nationale ont été annulés dans les zones touchées par les récentes émeutes. Tour de France des villes concernées.
En Île-de-France, "vigilance maximum"
En Île-de-France, où une centaine d'équipements publics dont 18 mairies ou annexes ont été touchés après la mort de Nahel, plus d'une quinzaine de feux d'artifice sont annulés. Nanterre, l'un des principaux théâtres d'affrontements, a annoncé cette annulation à l'AFP ce mercredi 12 juillet, évoquant les "éprouvants" évènements traversés.
En Seine-Saint-Denis, plusieurs villes ont annoncé des annulations ou reports sur les réseaux sociaux et leurs sites : Bagnolet, Rosny-sous-Bois, Aulnay-sous-Bois, Clichy-sous-Bois, Gournay-sur-Marne, Villepinte, Romainville ou encore Noisy-le-Sec.
Les communes de Vaires-sur-Marne, Bussy-Saint-Georges, Torcy ou Savigny-le-Temple en Seine-et-Marne, Gennevilliers dans les Hauts-de-Seine, ou encore Draveil et Vigneux-sur-Seine dans l'Essonne sont également concernées.
À Savigny-sur-Orge (Essonne), le maire évoque dans un communiqué une "décision difficile", prise au regard "du contexte et des avis défavorables de la Police nationale, de l'état major et des pompiers".
Les maires de Maisons-Alfort, Charenton-le-Pont et Saint-Maurice (Val-de-Marne) annulent aussi leur spectacle pyrotechnique commun sur les bords de Marne, "afin de préserver la sécurité".
Dans le Nord, "beaucoup d'inquiétude"
Mons-en-Baroeul, ville de l'agglomération lilloise où la mairie a été incendiée, a été parmi les premières à annuler son feu d'artifice. Municipalité et habitants "ont connu un traumatisme qui n'est pas tout à fait passé. Dès qu'on entend un pétard, il y a beaucoup d'inquiétude", a expliqué le maire DVG Rudy Elegeest, jugeant que "certaines braises couvent encore".
Le maire de Roubaix, Guillaume Delbar (DVD) lui a emboîté le pas. "C'est un choix simple, en se disant qu'il y avait déjà eu assez de feux et d'artifices les derniers jours, et que ce n'était pas la peine d'en rajouter", a-t-il dit. Entre véhicules incendiés et tirs de mortiers d'artifice, Roubaix a été particulièrement touchée par les violences.
Dans sa voisine Croix, un "show laser" prévu le 13 juillet est reporté, "après échanges avec les différentes autorités et les collègues du secteur", selon le maire Régis Cauche (LR). Un feu d'artifice est encore annulé à Hem.
"Fan zone", "filtrage" ou "contrôles"
Pour son feu d'artifice jeudi soir, Troyes a annoncé par communiqué la mise en place d'une "fan zone", à laquelle le public accédera "après un filtrage de sécurité". Pour épauler les polices nationale et municipale, 70 personnels de sécurité privée ont été recrutés. Le bal prévu ensuite à 23h30 a été annulé.
Dans le Bas-Rhin, la préfecture a "recommandé" d'éviter les feux d'artifice, mais cette fois en raison de "risques d'incendie", qui mobiliseront fortement les pompiers. La ville de Strasbourg a donc annulé son feu, tout comme la commune d'Illkirch-Graffenstaden, qui maintient son bal populaire avec "deux points de contrôle".
Dans le Centre-Val de Loire, à Montargis (Loiret), spectacle pyrotechnique et bals sont aussi annulés.
"Malaise profond"
Sur France Inter, le président de l'Association des maires de France (AMF) et maire LR de Cannes, David Lisnard, a déploré "le recul que cela représente que de ne pas assumer la Fête nationale". "Je comprends les maires", mais "c'est un signe de plus d'un malaise très profond dans la société française", a-t-il regretté.
"C'est terrible, ça veut dire à quel point d'effondrement on en est arrivé sur ces questions essentielles d'autorité de l'État. On a peur de ne pas être capable de maintenir l'ordre sur des événements festifs", a aussi déploré le député LR Olivier Marleix.
Pour la présidente du groupe RN à l'Assemblée Marine Le Pen, ce "renoncement" à la Fête nationale représente, "de la part de ces communes, un aveu de la perte totale de confiance en l'Etat".
Le gouvernement a annoncé mercredi un "dispositif exceptionnel" de 45.000 membres des forces de l'ordre pour assurer chaque soir la sécurité des festivités nationales des 13 et 14 juillet, dont les traditionnels débordements pourraient être amplifiés après les violences urbaines. Le "même modus operandi que lors des émeutes" sera déployé, a indiqué le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin lors d'une conférence de presse. Les forces spéciales du Raid, du GIGN et de la BRI ainsi que les hélicoptères et les véhicules blindés de la gendarmerie seront ainsi à nouveau engagés dans les communes les plus sensibles. De jeudi soir à samedi matin, un total de 130.000 "policiers, gendarmes et agents" seront mobilisés et jusqu'à 40.000 pompiers chaque soir pour faire face aux feux de poubelles, de voitures ou de bâtiments. Le préfet de police de Paris Laurent Nuñez a précisé que "pas loin de" 10.000 membres des forces de l'ordre seraient déployés dans la capitale et ses départements limitrophes. En sachant qu'à Paris, un concert et le traditionnel feu d'artifice restent prévus au Champ de Mars. "Nous avons particulièrement besoin de ces moments de rassemblement en famille ou entre amis. C'est aussi l'image de la France dans le monde à un an des Jeux Olympiques et Paralympiques de Paris", a réagi auprès de l'AFP le cabinet de la Maire de Paris. Depuis Vilnus, le président Emmanuel Macron a promis d'agir "avec la plus grande détermination" en cas de "débordements". "S'il y avait quelque débordement, nous interviendrions avec la plus grande détermination pour que l'ensemble de nos concitoyens puisse vivre dans le calme", a répondu le chef de l'État lors d'une conférence de presse à l'issue du sommet de l'Otan. La vigilance s'exerce avant tout sur l'Ile-de-France, le Nord et la région lyonnaise, selon une source sécuritaire. Dans tout le pays, sauf quelques exceptions, les bus et tramways s'arrêteront de nouveau plus tôt en soirée, jusqu'à 22H00 maximum, voire 21H00 en région parisienne. Les autorités veulent également faire respecter le décret interdisant jusqu'à samedi la vente de tous les articles de pyrotechnie, dont les "mortiers" d'artifice utilisés comme armes contre les forces de l'ordre ou pour incendier des bâtiments (sur ce décret, voir notre article du 10 juillet). Dans un télégramme du 6 juillet, Gérald Darmanin avait demandé aux préfets de renforcer les contrôles. "150.000 mortiers d'artifices" ont été saisis depuis le 27 juin, s'est-il félicité. Ces saisies "laissent supposer que les quartiers essaient de se réapprovisionner pour le 14 juillet", selon la source sécuritaire. |