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Europe - Gouvernance transfrontalière : les agglomérations pionnières plébiscitent le Gect et misent sur la démocratie participative

Après deux années riches d'échanges, les premières conclusions du projet "Expertises de la gouvernance dans les conurbations transfrontalières" (EGTC) ont été rendues publiques le 9 avril. L'objectif de ce projet : faire progresser la coopération transfrontalière entre les villes par la promotion d'outils de gouvernance innovants (voir ci-contre notre interview du 18 novembre 2008). Avec près d'un tiers de la population européenne vivant dans des zones transfrontalières et 25 millions d'habitants vivant dans l'une des 60 agglomérations transfrontalières identifiées en Europe, l'enjeu est réel. Le projet EGTC s'est appuyé sur un échantillon de six agglomérations - dont trois impliquent un territoire français - et a pu bénéficier d'un budget de 300.000 euros assuré par Urbact, le programme européen d'échanges "pour un développement urbain durable", lui-même co-financé par le Fonds européen de développement régional et par les Etats membres.
Invitée à rédiger un plan d'action local répertoriant les enjeux, les moyens et les solutions envisagées pour la mise en œuvre de ses projets, chaque agglomération a fait émerger des thématiques très différentes en fonction de ses priorités. Toutefois, "certains sujets se retrouvent au sein de tous les échanges", souligne Ludivine Salambo, coordinatrice du projet au sein de la Mission opérationnelle transfrontalière (MOT), chef de file du projet.
Ainsi, "la formalisation de la coopération transfrontalière a fait l'objet de grands débats", relève Ludivine Salambo. Au-delà de la convention ou de l'association, une structure juridique semble mettre tout le monde d'accord : le groupement européen de coopération territoriale (Gect), qui "permet d'identifier l'agglomération transfrontalière comme une entité unique qui a la capacité d'avoir son propre budget, son propre personnel et son système de prise de décision" et permet ainsi "d'aller plus loin dans la coopération". C'est d'ailleurs ce statut qu'a adopté le 4 février l'eurodistrict de Strasbourg-Ortenau. L'eurodistrict pourra ainsi plus facilement créer un territoire européen pilote agissant dans de nombreux secteurs dont les transports (avec une interconnexion à court terme des réseaux français et allemand à grande vitesse), l'économie avec la mise en place de synergies entre leurs équipements (comme les ports, les aéroports…) ou encore dans les domaines de l'enseignement supérieur, de la recherche et de la culture. Autre avantage selon la coordinatrice du projet : "Le Gect est le seul outil qui permette aux Etats de s'asseoir aux côtés des collectivités. Ainsi, le projet d'hôpital franco-espagnol à Puigcerda a vu le jour grâce au Gect car il a permis un partenariat entre l'Etat français et la région catalane."
Deuxième conclusion du projet EGTC : l'implication de la société civile, qui a fait l'objet d'initiatives intéressantes (voir ci-contre notre article "La MOT veut créer des communautés transfrontalières"). "Afin de rendre la coopération transfrontalière légitime sans élection, il faut consulter les citoyens par d'autres moyens. C'est ainsi qu'est apparue la question de la e-démocratie, avec la création d'une plateforme web sur laquelle les citoyens pourront s'exprimer. Une initiative en cours de réalisation à Strasbourg", indique Ludivine Salambo.
Des outils de démocratie participative entre élus et entreprises ont également été imaginés. Ainsi, l'eurométropole Lille-Kortrijk-Tournai, dont Martine Aubry vient d'être élue présidente, s'est dotée d'un forum en septembre 2009. Ou comment réunir "les forces vives de la région" afin de participer à la réflexion transfrontalière, d'émettre des avis ou de formuler des propositions de projets.
Toutes ces conclusions seront officiellement dévoilées lors de la conférence finale du projet EGTC qui se déroulera les 6 et 7 mai 2010 à Esztergom en Hongrie. Elles devraient permettre d'envisager la désignation d'un commissaire européen dédié à la question transfrontalière ainsi que la constitution d'un intergroupe chargé de la coopération transfrontalière par la Commission européenne. Elle sera aussi l'occasion de publier un "handbook" répertoriant les bonnes pratiques des projets existants. Par ailleurs, les partenaires du projet comptent faire pression sur les décideurs de la politique de cohésion 2013-2020 afin que les Gect puissent bénéficier de subventions globales. Enfin, un nouvel outil juridique susceptible de favoriser l'émergence de véritables eurorégions - mais aussi de faciliter la mise en œuvre d'agglomérations transfrontalières au sein de pays non-membres de l'Union européenne -, le "groupement eurorégional de coopération" (GEC), conçu sur la base du fonctionnement du Gect, devrait être mis en place au second semestre 2010.

 

Muriel Weiss
 

 

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