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Solde du marché : les surcoûts engendrés par le seul titulaire ne sont pas des travaux supplémentaires

La cour administrative d’appel (CAA) de Marseille est revenue, dans un arrêt d'avril dernier, sur les conditions d’indemnisation du titulaire du marché en cas de surcoût. La CAA a réformé le jugement du tribunal administratif (TA) de Montpellier, considérant qu’un ordre de service prolongeant un délai contractuel ne pouvait constituer le fondement d’une demande d’indemnisation au titre des travaux supplémentaires effectués à la seule initiative du titulaire du marché.

Dans les faits, la commune de Puisserguier avait conclu un marché à procédure adaptée avec un groupement conjoint composé notamment des sociétés Sade CGTH et Abello. La maîtrise d’œuvre (MOE) de ce marché portant sur la réalisation d’un réseau de transport d’eaux usées et la création d’une station d’épuration était assurée par le cabinet Cetur Languedoc-Roussillon et la société Cetur ingénierie. Le cahier des clauses techniques particulières (CCTP) de ce marché prévoyait que certains équipements devaient être composés d’un matériau spécifique, l’apatite. Afin d’exécuter au mieux son contrat, la Sade CGHT a "initié un programme de recherches visant notamment à la production d’apatite". Ce programme ayant généré un surcoût, la société a demandé à la commune d’inclure ces frais supplémentaires dans le solde du marché. La commune ayant refusé de le faire, la société a saisi le TA de Montpellier en vue de la condamnation solidaire de cette dernière et des MOE à lui verser la somme de 1.210.510,49 euros au titre du règlement du solde du marché. Suite au rejet de sa demande, la société a interjeté appel auprès de la CAA de Marseille.

Pas d’indemnité en cas de surcoût résultant de la seule initiative du cocontractant

La Sade CGTH a fait appel du jugement de première instance au motif que le calcul du solde du marché fait par le TA n’incluait pas le surcoût lié à la fabrication et à la fourniture industrielle d’apatite, minerai indispensable à la réalisation des équipements demandés. En l’espèce, après avoir informé la collectivité de l’état d’avancement de son programme de recherches, la société a sollicité une prolongation des délais contractuels de trois mois. Cette prolongation lui a été accordée par ordre de service. Toutefois, la CAA a estimé que cet ordre de service ne démontrait pas "une volonté commune des parties sur la mise en œuvre d’un programme de recherche et d’industrialisation de l’apatite". Les juges d’appel ont donc rejeté la demande de la Sade CGTH tendant à intégrer ce surcoût au solde du marché au motif que "la société requérante ne saurait se prévaloir de cet ordre de service pour fonder sa demande d’indemnisation au titre des travaux supplémentaires résultant du programme de recherches lancé à sa seule initiative". Ils ont ensuite rappelé que "les difficultés rencontrées dans le cadre de l’exécution d’un marché à forfait ne peuvent ouvrir droit à indemnisation au profit de l’entreprise titulaire du marché que dans la mesure où celle-ci justifie soit que les difficultés ont eu pour effet de bouleverser l’économie du contrat, soit qu’elles sont imputables à une faute de la personne publique". La Sade CGHT n’est donc pas fondée à demander une indemnité au titre de travaux supplémentaires liés à la fabrication de ce matériau.

Le titulaire, seul responsable de son retard

La société demandait également que les retards occasionnés par son programme de recherches ne soient pas pris en compte dans le calcul des pénalités de retard. En l’espèce, la CAA a jugé que le délai pris par la société Sade CGTH pour effectuer les recherches sur l’apatite ne saurait être exclu du décompte des jours de pénalités. En effet, comme le dispose l’article 20 du cahier des clauses administratives générales (CCAG) "en cas de retard imputable au titulaire dans l’exécution des travaux, une pénalité journalière est appliquée". En l’espèce, le retard lié au programme de recherches n’était imputable qu’à la Sade CGTH puisqu’il ne résultait ni d’une demande du maître d’ouvrage, ni d’une stipulation contractuelle. La CAA a donc tenu compte de ce retard dans le calcul du montant des pénalités de retard.

Référence : CAA de Marseille 10 avril 2017, n° 15MA03854
 

 

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