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Communication - Brétilliens, Loirétains, Samariens et autres gentilés

La question des noms de collectivités et de leurs habitants est un serpent de mer de la communication et du marketing territorial. On se souvient, il y a une dizaine d'années, de la tentative radicale, mais avortée, de Georges Frêche de rebaptiser le Languedoc-Roussillon en "Septimanie" (l'ancienne dénomination aux origines wisigothes).

Pas de pitié pour les jeux de mots

Plus près de nous, la Seine-Maritime, qui s'appela longtemps la Seine-Inférieure, a baptisé, le 1er janvier 2006, ses habitants les Seinomarins. L'opération a été une réussite, même si le gentilé - c'est le terme désignant le nom que portent les habitants d'un territoire - ne s'est guère imposé au-delà des limites du département. Enfin, le 2 janvier 2012, le conseil général de la Somme annonçait, à l'issue d'une vaste concertation,  que les habitants du département s'appelleront désormais les Samariens (voir notre article ci-contre du 3 janvier 2012). Enfin on n'aura garde d'oublier que les Côtes-d'Armor s'appelèrent longtemps les Côtes-du-Nord, au risque de laisser croire que la baignade pourrait être réservée aux plus intrépides...
Le goût pour les gentilés semble repartir de plus belle, avec aujourd'hui trois procédures en cours ou qui viennent de s'achever. Le 20 juin, le conseil général d'Ille-et-Vilaine a ainsi décidé que les habitants du département s'appelleront les Brétilliens. Ce gentilé l'a emporté par 38 voix contre 12 à Hauts-Bretons, 2 abstentions et un refus de vote. En l'occurrence, le conseil général n'a pas tenu compte du sondage informel organisé un an plus tôt par le quotidien Ouest France et qui avait largement placé en tête le gentilé "Breiz-Illiens". Le président du conseil général s'est en effet dit peu convaincu qu'un tel jeu de mots - les Brésiliens - aurait du sens dans la durée.

Démocratie participative

Le 27 juin, le conseil général du Loiret a annoncé à son tour que les habitants du département s'appelleront les Loirétains. S'il n'a pas vraiment le mérite de l'originalité, ce gentilé a au moins celui de la démocratie participative. Contrairement à l'Ille-et-Vilaine, le département s'en est en effet remis aux habitants pour choisir leur nom et a respecté le résultat final. Le public a ainsi proposé 1.800 noms sur un site dédié. Le 10 juin, un jury de professionnels et de personnalités du Loiret s'est réuni afin de choisir trois noms parmi ces propositions. Ces trois noms ont ensuite été soumis à un vote sur internet, mais aussi grâce à 300 urnes disposées dans les mairies. Au final, 19.000 personnes ont participé au vote, qui a vu Loirétains l'emporter facilement (53,85% des voix), devant Loiréanais (35,12%) et Ligéritains (11,3%). Enfin, une opération similaire est en cours pour baptiser les habitants de l'Ain.

Le flop des Mariligériens

Si la recherche de gentilés semble aujourd'hui à la mode, le succès n'est pas garanti pour autant. Certains noms choisis ne semblent pas forcément promis à un grand avenir. Par exemple, on ne prendra pas de pari sur le succès de Mariligériens, supposé désigner les habitants de la Loire-Atlantique, qui s'appela longtemps la Loire-Inférieure. Même l'article consacré au département sur le site d'un célèbre site encyclopédique contributif ignore que l'on désigne ainsi les habitants de Loire-Atlantique.
Enfin, l'opération peut tout simplement échouer. Ce fut le cas en 2009, avec la concertation lancée pour rebaptiser la région Paca et qui a finalement été abandonnée en cours de route, aucun nom ne s'étant véritablement dégagé de la consultation des habitants (voir nos articles ci-contre des 19 mai et 22 décembre 2009). Le contexte n'est toutefois pas tout à fait le même. Car si le gentilé n'obéit à aucune règle et peut donc se créer ou se modifier librement, il faut une loi pour changer le nom d'une région, comme Georges Frêche l'apprit à ses dépens.