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DSP - Biens de retour et résiliation anticipée : quelle indemnisation pour le délégataire ?

Dans une décision du 20 juin 2018, le Conseil d'Etat a tranché une affaire relative au régime des biens de retour. En cas de résiliation anticipée d'une délégation de service public (DSP), le délégataire peut-il prétendre à l'indemnisation de la valeur des biens non amortis ?

En l’espèce, le centre hospitalier de Valenciennes avait conclu avec la société LCH une DSP visant à mettre à disposition des patients des appareils audiovisuels et de télécommunication. Suite à de nombreux dysfonctionnements, l’hôpital a résilié le contrat. La société délégataire a alors saisi le tribunal administratif (TA) de Lille en vue d’être indemnisée de la valeur des biens non amortis, à hauteur de 1,7 millions d’euros. Suite au rejet de sa demande, elle a saisi la cour administrative d’appel (CAA) de Douai qui a condamné l’hôpital à lui verser 154.206 euros, mais cette indemnisation ne concernait pas les biens de retours non amortis. Estimant qu’il n’était pas redevable d’une telle somme, l’établissement hospitalier a saisi le Conseil d’Etat d’un pourvoi en cassation.

Les juges de cassation ont tout d’abord rappelé que, dans le silence de la convention, les biens de retour, biens nécessaires au fonctionnement du service public créés ou acquis par le délégataire, appartiennent à la personne publique délégante. S’ils ont été financièrement amortis, ces biens reviennent gratuitement à la personne publique à la fin de la convention. Les parties peuvent toutefois prévoir que des biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public reviennent à l’entreprise délégataire. En revanche, si la personne publique résilie la convention avant son terme et que ces biens ne sont pas amortis, le délégataire peut demander une indemnisation à ce titre.

En l’espèce, la DSP prévoyait que "le mobilier multimédia installé sera maintenu par le délégataire pendant toute la durée de la convention de délégation. A son issue, il sera intégré au patrimoine de la collectivité sans contrepartie financière, dans le cadre des biens de retour". La CAA de Douai s’est appuyée sur ces stipulations pour considérer qu’aucune indemnité ne pouvait être accordée à la société au titre des biens de retours. Le Conseil d’Etat n’a toutefois pas suivi ce raisonnement. Il a pour sa part considéré que cette disposition n’était pas applicable en l’espèce dans la mesure où elle s’appliquait seulement au cas où la convention serait arrivée à son terme initialement prévu. La DSP ayant été résiliée par anticipation, la CAA ne pouvait donc pas valablement se fonder sur cette disposition pour rejeter la demande du délégataire.
Dès lors, en refusant d’indemniser la société de la valeur des biens de retours non amortis, la CAA de Douai a dénaturé les termes de la DSP. Le Conseil d’Etat a donc annulé l’arrêt d’appel et renvoyé l’affaire devant la CAA.

Cette décision est d’autant plus intéressante que lors d’une audience le 15 juin dernier, le Conseil d’Etat réuni en section, l’une de ses formations les plus solennelles, a statué sur une affaire relative à la propriété et l’indemnisation des biens de retours non amortis. Des évolutions à venir sur ce régime ? Réponse très prochainement.

Référence : CE, 20 juin 2018, n° 408507
 

 

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